Jusqu’au 6 juillet 2014
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Musée d’Orsay, 1 rue de la Légion-d’Honneur, Paris VII
Comprendre l’oeuvre de Van Gogh (1853-1890) à travers le regard d’un autre interné, l’écrivain Antonin Artaud (1896-1948); tel est le défi lancé par le musée d’Orsay, qui s’appuie sur le texte d’Artaud Le suicidé de la société.
En fait, le musée ne fait que reprendre l’idée originale du galeriste Pierre Loeb. Celui-ci avait suggéré à Artaud d’écrire un texte sur le peintre, quelques jours avant l’ouverture de la rétrospective « Vincent Van Gogh » au musée de l’Orangerie en 1947. Pensant qu’un écrivain, qui avait été interné pendant neuf ans dans un asile psychiatrique, était le mieux placé pour comprendre l’oeuvre d’un autre artiste, considéré comme fou.
Pas motivé au début, Artaud accepte suite à la publication dans la presse d’extraits du livre du Dr François-Joachim Beer, Du démon de Van Gogh. Outré par l’analyse du psychiatre Beer, Artaud commence à rédiger sous le coup de la colère à la fin du mois de janvier 1947. Pour l’écrivain, ceux qui considèrent Van Gogh comme un esprit dérangé, veulent seulement l’empêcher d’émettre « d’insupportables vérités » car sa peinture les dérange. Et c’est ce rejet de la société qui le pousse au suicide.
« Et c’est ainsi que Van Gogh est mort suicidé, parce que c’est le concert de la conscience entière qui n’a plus pu le supporter », écrit-il dans Le suicidé de la société.
L’exposition montre une quarantaine de tableaux en fonction du regroupement qu’en fait Artaud, dont le texte est cité sur les cimaises et, par endroit, déclamé par un conteur.
Ainsi de la partie introductive : « Une terrible sensibilité »
« Un fou Van Gogh? / Que celui qui a su un jour regarder une face humaine regarde le portrait de Van Gogh par lui-même […]. / Peinte par Van Gogh extra-lucide, cette figure de boucher roux, qui nous inspecte et nous épie, qui nous scrute d’un oeil torve aussi. / Je ne connais pas un seul psychiatre qui saurait scruter un visage d’homme avec une force aussi écrasante et en disséquer comme au tranchoir l’irréfragable psychologie. »
Ou encore : » De l’autre côté de la tombe »
« Van Gogh a renoncé en peignant à raconter des histoires, mais le merveilleux est que ce peintre, qui n’est que peintre, […] fait venir devant nous, en avant de la toile fixe, du paysage sabré, labouré et pressé de tous les côtés par son pinceau en ébriété. / Pourquoi les peintures de Van Gogh me donnent-elles ainsi l’impression, d’être vues comme de l’autre côté de la tombe d’un monde où ses soleils en fin de compte auront été tout ce qui tourna et éclaira joyeusement? / Car n’est-ce pas l’histoire entière de ce qu’on appela un jour l’âme qui vit et meurt dans ses paysages convulsionnaires et dans ses fleurs? »…
© Editions Gallimard, 1974
A voir : la projection du Champ de blé aux corbeaux de Van Gogh, installation sur vidéo-projecteur, avec la voix d’Alain Cuny lisant l’analyse d’Artaud d’une oeuvre, considérée à l’époque comme la dernière sur laquelle Van Gogh travaillait au moment de se suicider, au plein champ. Il y décèle les indices d’un drame annoncé par les blés convulsés et le vol funeste des oiseaux. Pour Artaud, le tableau cristallise le drame de la solitude du peintre.