Jusqu’au 25 janvier 2009
[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-VAN-DYCK-DYCK.htm]
Musée Jacquemart-André, 158, boulevard Haussmann 75008, 10€
Le musée Jacquermart-André présente la première exposition monographique consacrée au portraitiste flamand Antoon Van Dyck (1599-1641) en France. Apprenti de Rubens, Van Dyck ne tardera pas à égaler son maître. Au point de soulever le doute quant à l’authentification du patronyme de certaines oeuvres…
L’exposition se découpe en quatre parties, suivant les différents lieux où l’artiste vécut et qui influencèrent son art.
Antoon Van Dyck naît à Anvers en 1599, dans une famille nombreuse (il est le septième enfant) et prospère – son père est un riche drapier et marchand de soie.
Très jeune, Antoon révèle des qualités artistiques. Il est formé dans la célèbre guilde de Saint-Luc sous le patronage de Hendrik van Balen avant d’entré en 1617 dans l’atelier de Rubens.
Un an plus tard, il est reçu maître à la guilde de Saint-Luc, ce qui lui permet d’occuper d’office le poste de second de Rubens. Le maître reconnaît très vite la valeur de son second et lui demande de l’assister dans l’exécution des 39 compositions composant le décor du plafond de l’église anveroise (1620).
Parallèlement, Van Dyck réalise avec dextérité ses premiers portraits de la bourgeoisie locale, dans la grande tradition flamande. Mais déjà perce l’audace du jeune homme. Dans le double Portrait d’un homme et de son épouse (vers 1618-19), l’artiste respecte l’usage du portrait flamand en plaçant l’époux à gauche, dans une position plus affirmée que son épouse à sa droite. Mais, contrairement à la tradition, Van Dyck réunit le couple – au lieu de réaliser deux portraits séparés – et souligne l’harmonie et l’affection que se portent les époux par l’union symbolique de leur main droite et la mise en valeur de l’alliance de l’épouse. Dans Un Portrait de famille (autour de 1620), Van Dyck délaisse la composition hiérarchique pour mieux souligner le rôle de l’enfant, qui fait le lien entre les époux, et rendre le climat de bonheur familial.
Pour introduire de la souplesse dans ses portraits, l’artiste n’hésite pas à incliner le buste de ses sujets.
Van Dyck cherche également à souligner la noblesse de ses modèles (cf. Portrait d’homme, 1620-21?), annonçant les portraits aristocratiques pour lesquels il sera très couru à travers l’Europe.
« A Anvers, Van Dyck est gêné par le succès de son maître. Il sait qu’il ne pourra pas occuper le poste de premier du vivant de Rubens », explique Alexis Merle du Bourg, commissaire de l’exposition. Après un premier séjour en Angleterre (1620-21), Van Dyck part pour l’Italie (1621-27), parcourant Gênes, Rome, Venise, Palerme. Fasciné par Raphaël et Titien, Van Dyck murit son style et s’affirmera comme un pittore cavalieresco (peintre gentilhomme) comme l’atteste son Autoportrait (1622-23) le révélant sûr de lui, à la limite de l’arrogance. Dans la biographie de l’artiste (1672), Giovanni Pietro Bellori (1613-1696) décrit le faste déployé à Rome par Van Dyck pour attirer les regards par ses manières d’aristocrate, sa suite de domestiques et ses luxueuses tenues. Une attitude qui se retrouve dans le Portrait de Lucas et Cornelis de Wael (1627), peintres et marchands d’art qui accueillent Van Dyck pendant son séjour à Gênes: vêtus de noir, ils semblent regarder de haut le spectateur, le cadet (à droite) donne une impression de désinvolture chic – cette aisance hautaine naturelle nommée sprezzatura en italien. L’artiste met à l’honneur une aristocratie de l’excellence, reposant sur les qualités propres au sujet, leur virtu, et non sur le sang.
De retour à Anvers (1627-32), Van Dyck devient le portraitiste fétiche de la bourgeoisie anveroise, de la noblesse flamande et brabançonne ainsi que de l’aristocratie étrangère établie dans les Pays-Bas espagnols. Cette fois-ci, Van Dyck ose inverser la composition traditionnelle: il place Anna Wake (fille aînée d’un riche marchand anglais établi à Anvers) à la gauche de son époux, vêtue d’une robe de satin noir – marque que la mode française s’exporte, au détriment du costume hispano-flamand sévère et moins seyant – et témoigne dans le portait de ce dernier (Peeter Stevens) des sentiments que le jeune homme porte à Anna. Là encore, Van Dyck propose une vision moderne du mariage, fondée non pas sur la hiérarchie mais sur l’harmonie et le respect réciproque.
« Appelé à la cour d’Angleterre, en 1632, Van Dyck sera pour Charles Ier ce que Titien avait été pour Charles Quint, l’artiste qui fixa pour la postérité l’image du souverain et de sa famille », poursuit Alexis Merle du Bourg.
Van Dyck immortalise l’Angleterre des Stuart, l’époque d’une grande sophistication culturelle, qui sera anéantie par la guerre civile et la République puritaine – la période caroline.
Nommé « principalle Paynter in Ordinarie to their Majesties« , Van Dyck est aussitôt fait chevalier à St. James Palace. Les sujets anglais sont vêtus de drapés chatoyants, souvent placés en plein air et témoignent presque toujours d’une grande impassibilité propre à la société de cour. Ce détachement froid (cf. Portrait de Charles Louis) est compensé par la couleur de leurs tenues et un décor élégiaque (cf. Portrait du prince Rupert), qui place les sujets-héros comme sur une scène théâtrale.
Un cabinet de dessins conclut cette magnifique exposition, qui permet d’apprendre – s’il en était besoin! – à apprécier l’art du portrait grâce à la virtuosité technique de Van Dyck, considéré au XVIIe siècle comme le plus grand portraitiste européen. Tel que l’a été Titien au siècle précédent.