Pour ceux, comme moi, qui sont allergiques aux grosses foires d’art contemporain – elles me donnent la même réaction que la ribambelle de produits laitiers dans les grandes surfaces -, sans pour autant passer à côté de l’effervescence générée par la FIAC, voici une autre idée de visite : l’exposition « A triple tour » . Pour la première fois, une sélection parmi les 2.500 oeuvres de la collection de François Pinault est présentée à Paris. Elles sont accueillies au sein de la Conciergerie, avec comme thématique évidente : l’enfermement. Qu’il soit lié à des facteurs exogènes ou internes à l’homme (auto-aliénation).
Cinquante oeuvres de 23 artistes sont exposées avec comme point de départ l’oeuvre de Michelangelo Pistoletto, La Gabbia (La Cage, 1962/74) : une installation faite de miroirs, qui brouille la perception. Le visiteur a l’impression d’être enfermé, sans pour autant être privé de sa liberté.
La première partie du parcours traite des grands bouleversements qui frappent nos sociétés :
Dangers écologiques (Chernobyl de Diana Thater, 2010) ;
Impossibilité de communiquer : vidéos de Bill Viola, Hall of Whispers, 1995, où des hommes et femmes tentent de parler derrière un foulard qui étreint leur bouche) ;
Prisons, guerre civile ;
Terrorisme : humour de Raphaëlle Ricol, Malgré la différence, 2009, qui rapproche une femme en burka d’un fanatique du Ku Klux Klan.
La seconde partie se concentre sur l’individu, confronté à lui-même et ses démons :
Angoisse de la vieillesse (Sun Yuan & Peng Yu, Old Persons Home, 2007 : invasion de 13 fauteuils roulants automatiquement avec des papis cireux assis dessus, affublés d’habits de VIP politiques ;
Phobie de la maladie et de la mort : Damien Hirst, The Fragile Truth, 1997/98, vitrine remplie de médicaments ;
Culpabilité : installation de Kristian Burford au titre d’une longueur jamais vue! : Last night you brought a man up to your room after having a late drink at the hotel bar. Knowing that you are HIV positive you had sex which caused him to bleed. After a day of meetings you now return to your room, 2011 ;
Verrouillage mental : Fridrich Kunath, The Past is a Foreign Country, 2011 – un homme à la chemise hawaïenne a la tête englobée dans une boule où des flocons de neige tombent ;
Ou corporel : statue à l’antique à base de matériel ambulatoire et béton, 2011, de Justin Matherly.
Mise en scène par Caroline Bourgeois, commissaire des expositions de la collection Pinault depuis 2007, « A triple tour » ressemble à un cabinet de curiosités, où d’illustres artistes côtoient de parfaits inconnus, les oeuvres des premiers n’ayant pas toujours à envier à celles de leurs petits camarades.