Shoja Azari – There are no non-believers in hell
Jusqu’au 19 mai 2011
Galerie Jérôme de Noirmont, 38 avenue Matignon 75008
Après avoir découvert la brillante artiste iranienne, Shirin Neshat, la galerie de Noirmont expose l’oeuvre de son compagnon, Shoja Azari, pour la première fois en France. Tous deux expatriés aux Etats-Unis depuis 1983, ils témoignent de la vivacité de l’art contemporain iranien. Hors frontières.
Shoja Azari (né en 1958, à Shiraz), comme Shirin Neshat, témoignent dans ses vidéos de son assimilation de la culture occidentale, qu’il associe à celle de son pays d’origine. Pour tenter de révéler une autre image de son pays natal, loin des clichés médiatiques.
L’artiste reprend ainsi l’iconographie populaire iranienne en l’associant aux oeuvres des grands maîtres de la peinture occidentale, tel Le Sacrifice d’Isaac par Abraham de Rembrandt ou L’incrédulité de Saint Thomas du Caravage, pour la combiner avec des images des protagonistes religieux iranieux. Dans sa vidéo intitulée There are no non-believers in Hell (2010), il associe ces deux toiles emblématiques de l’art occidental et les réduit en flammes. S. Azari inverse ici le préjugé occidental consistant à assimiler l’ensemble de la communauté musulmane aux fanatiques religieux. Tel que l’a vécu le couple depuis les attentats du 11 septembre 2001 à New York. Et comme l’atteste le sermon du fondamentaliste américain qui avait appelé à un autodafé du Coran en septembre 2010, auquel fait référence la vidéo.
Shoja Azari poursuite ce détournement de l’iconographie chiite dans sa série des Icons (2010). Transgressant le sacré, il reprend des représentations officielles des imams, martyrs et saints islamiques – soit des faces masculines – pour les travestir en femmes. Telles des madonnes chrétiennes. Un beau pied de nez à l’histoire chiite!
Ainsi, dans Icon #3, l’imam Reza, mort en martyr au IXe siècle, est recouvert d’un turban vert, couleur symbolique de l’Iran, devenue en 2009, couleur de l’opposition, et est doté d’un visage de femme éplorée. L’artiste évoque par là-même le destin de ces femmes martyres, victimes de la Révolution verte, qui vénéraient justement les icônes chiites…
Un art engagé qui a la possibilité d’exprimer sa contestation, que ce soit envers le régime dictatorial iranien aussi bien qu’envers les dérives de la société américaine, grâce à cette expatriation. Ce qui n’empêche pas Shoja Azari de parvenir à témoigner des aspirations contemporaines de la jeunesse iranienne et de lever le voile sur une culture millénaire, peu connue en Occident.