Blake & Mortimer au musée des Arts et métiers
Jusqu’au 5 janvier 2020
Musée des arts et métiers, 60 rue Réaumur, Paris 3e
C’est L’exposition familiale de l’été ! « Scientifiction » présente des planches originales de Blake & Mortimer, personnages inventés par l’illustrateur belge Edgar P. Jacobs, confrontées à des inventions scientifiques, passées, présentes et futures !
Le parcours se focalise sur le lien entre science et fiction comme fil rouge des huit albums originaux de Blake & Mortimer. Le sens de la visite est libre, et se déroule autour de quatre éléments – le feu, l’eau, l’air, et la terre – qui servent de prismes à l’exploration des domaines de la physique, chimie, biologie, minéralogie, radioactivité, etc.
Pour mieux comprendre cette approche originale effectuée par les commissaires de l’exposition, Thierry Bellefroid (journaliste à la radio-télévision publique belge, RTBF) et Eric Dubois (enseignant à l’école Boulle), il faut retourner aux sources d’inspiration des albums de Jacobs.
Chanteur d’opéra (baryton), Edgar P. Jacobs entre à l’âge de 41 ans dans l’univers de l’illustration, au moment de la Seconde Guerre mondiale. Il débute par des affiches publicitaires. Grâce à son ami d’enfance Jacques Van Melkebeke, rédacteur en chef du Journal Tintin, il rencontre Hergé, dont il ne connaît alors pas le héros ! Il devient son assistant, chargé des couleurs.
Puis, la rédaction lui confie rapidement la création d’une nouvelle BD, dont les héros serviront de matrice aux aventures de Blake et Mortimer : Le Rayon U (1943).
Le goût du spectacle, le perfectionnement technique du dessin, et l’atmosphère frissonnante du cinéma expressionniste allemand sont les trois éléments clés qui permettent à E.P. Jacobs de planter le décor de la saga Blake & Mortimer.
Ce qui précède n’était que le préambule de l’exposition ! Les visiteurs découvrent ensuite une scénographie qui renvoie à L’opéra de papier – titre de l’autobiographie du dessinateur, publiée dans les années 1980 chez Gallimard.
Espace fluide, lumière tamisée avec éclairage spécifique sur les objets du musée ou les planches originales (une soixante qui sera renouvelée à partir du 3 octobre) amènent le visiteur à vivre « le basculement du temps de l’alchimie vers la chimie moderne », commente Eric Dubois.
Un sabre foudroyé renvoie aux cataclysmes météorologiques de S.O.S. Météores. Un branchement de regard d’égout évoque les catacombes et les égouts de Paris arpentés dans L’Affaire du collier. Un modèle de turbo générateur de bord Espadon rappelle l’arme révolutionnaire conçue par Mortimer dans Le Secret de l’Espadon. Etc.
La dernière salle est conçue comme un laboratoire. On découvre les modèles en 3D d’engins ou de bustes de personnages réalisés par Edgar P. Jacobs lui-même lorsqu’il n’arrivait pas à les croquer correctement. Ainsi du chronoscaphe – machine inventée par Jacobs pour voyager dans le temps – ou du robot Samurai II du professeur Akira Sato. Deux scientifiques (Dominique Leglu, Guy Perrin) et deux auteurs de BD (Marion Montaigne, François Schuitten) répondent aux questions des commissaires dans des vidéos évoquant les frontières poreuses entre science et fiction.
Une exposition particulièrement bien conçue et mise en scène. Elle apporte un nouvel éclairage tant sur les compositions minutieuses des planches (les cases se répondent de manière symétrique en diagonale) que sur l’évolution positive mais aussi négative (telle la bombe nucléaire) des techniques depuis le XIXe siècle. Pour aller plus loin, profitez de la parution du génial catalogue de l’exposition et de la parution du Dernier Pharaon de F. Schuitten (ed. Dargaud), véritable hommage à l’univers d’Edgar P. Jacobs.
Vacances scolaires obligent, le rythme des publications va ralentir… Je vous souhaite un très bel été !