Aux origines de la peinture italienne
Jusqu’au 12 mai 2025
Musée du Louvre, Paris 1er
La restauration de la Maestà et celle de La Dérision du Christ (oeuvre acquise en 2023) de Cenni di Pepo dit Cimabue (1240-1301/02) sont l’occasion pour le musée du Louvre de revenir sur ce peintre italien à la vie quasi-inconnue mais dont l’oeuvre pose la pierre angulaire de la peinture occidentale.
Ce peintre, dont seule une quarantaine d’oeuvres nous sont parvenues, cherche à représenter pour la première fois le monde tel qu’il le voit. Et non selon les critères des icônes byzantines considérées comme des images aicheiropoïètes, c’est à dire « non faites de la main d’homme », et dans lesquelles les personnages sacrés ne doivent pas ressembler aux humains.
Leurs déformations anatomiques codifiées sont visibles sur la Croix de San Ranierino de Giunta Pisano – figure artistique dominante de l’époque – ou dans la Madone Kahn (réalisée par un peintre byzantin inconnu).
Au coeur de l’exposition s’élève la Maestà de Cimabue qui rompt donc avec les conventions des icônes orientales. Le peintre cherche à prêter des traits plus enfantins à Jésus, bien qu’il conserve des cernes d’adulte ! Cependant, l’influence orientale demeure dans le tissu qui recouvre le trône et la bordure rouge couverte de fausses inscriptions islamiques. Une carte permet de comprendre le contexte géo-politique de l’époque avec un royaume italien au coeur des échanges commerciaux avec la Méditerranée et l’Orient. La restauration de l’oeuvre, dégagée de ses multiples couches de vernis, permet de révéler l’éclat de la tunique de Marie, composée de lapis-lazuli – pigment byzantin par excellence.
La monumentalité de cette oeuvre laisse supposer que Cimabue disposait d’un atelier, dont l’un des élèves serait Giotto. « Cimabue aurait également influencé le peintre siennois Duccio di Buoninsegna comme on peut le voir dans la Madone de Crevole par rapport au modelé du visage de la Vierge et les jeux de transparence qui se rapprochent de la Maestà », commente Thomas Bohl (conservateur au département des Peintures, musée du Louvre), commissaire de l’exposition.
Comme dans Revoir Watteau (visible jusqu’au 3 février 2025), ce genre de petite exposition dossier se révèle passionnante, avec en sus des prêts exceptionnels (oeuvres considérées comme Trésor national, rarement sorties de leurs pays). À découvrir !