Pedro Costa, Rui Chafes, Paulo Nozolino
Jusqu’au 22 août 2022
#LeResteEstOmbre
@CentrePompidou
Centre Pompidou, Paris 4e
Dans le cadre de la saison France-Portugal, le Centre Pompidou accueille trois artistes de la génération de la Révolution des Oeillets (avril 1974) et leur consacre une exposition noirissime, conçue comme un labyrinthe au croisement de leurs quêtes artistiques.
Le titre de l’exposition est emprunté au grand poète de la modernité portugaise Fernando Pessoa. Peu de place à la lumière dans cette confrontation de trois oeuvres usant d’un médium différent : film, sculpture, photographie. Qui se répondent pourtant dans une « transaction », un « effet de montage », explique Jonathan Pouthier, commissaire de l’exposition, selon le principe emprunté au cinéaste Sergueï Eisentein : « deux images n’en produisent pas une troisième, mais un concept ».
Les sculptures de Rui Chafes jouent de la dualité entre leur matière (le fer) / leur forme (biomorphe), et la luminosité. Noires, elles captent le peu de lumière diffusée par les spots et semblent surgir de la pénombre de la salle.
À l’instar des vidéos de Pedro Costa qui dresse des portraits filmés, suspendus au plafond, devant lesquels flottent des sculptures aériennes en métal noir telles des algues. Le visiteur semble assister à l’apparition d’âmes noyées.
Celles des civils ukrainiens ? Tel que nous renvoient les photographies de Paulo Nozolino : un coin de murs d’où dégoulinent des traces de sang. Ou bien celle de cet enfant blessé, les yeux ouverts, dont on ne sait s’il est encore vivant. Incertitude renforcée par une plaque en métal gris gisant au centre de la pièce : brancard de fortune ou pierre tombale ?
Une exposition noire, plombante moralement, mais brillamment conçue !
On retrouve un peu d’oxygène avec les oeuvres de Tatiana Trouvé exposées dans la salle adjacente (#ExpoTatianaTrouvé) qui évoquent les mécanismes du rêve dans des scènes, qui pourraient représenter l’intérieur du psyché. Images de paysage étrange, avec un fil argenté qui se faufile sur les oeuvres et au sol. Jeu de méandres qui m’évoque l’univers littéraire de Cyril Liéron Dans la tête de Sherlock Holmes (tome 1 et tome 2).
Finalement, le titre de l’exposition de Tatiana Trouvé résume l’ambiance de ces deux expositions atypiques : « Le grand atlas de la désorientation ». À voir !