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(Re)découvrez les splendeurs de l’art sassanide

Les Perses Sassanides – Fastes d’un empire oublié, 224-642

Musée Cernuschi, 7 avenue Vélasquez, 75008

15 septembre – 30 décembre 2006

Réservations: 01 53 96 21 50

Second musée d’art asiatique en France (12.000 oeuvres), le musée Cernuschi présente une rare exposition sur l’âge d’or de la province du Fars – berceau historique de l’Iran – dirigée entre les IIIè et VIIè siècles par les somptueux Perses Sassanides.

Un peu d’histoire…

Au début du IIIè siècle, le prince de Perside, Ardashir, se libère du roi Artaban et forme l’empire parthe. La dynastie des Perses Sassanides va régner quatre cent ans durant sur cet immense territoire, à la croisée des chemins entre l’Occident – dominé par les Romains puis les Byzantins – et l’Orient.

La résurgence d’un pouvoir monarchique fort et ambitieux stimule la production d’un art royal luxueux, qui sera décuplé par les imitations dans les ateliers de province. Cet art de cour est éclectique, subissant diverses influences occidentales et orientales.

La première salle décline de la vaisselle d’argent produite au coeur de l’empire, dans les ateliers royaux. Les plats et les coupes à pied en argent sont destinés à mettre en images la gloire du souverain et symboliser l’autorité de sa couronne.

Deux immenses reliefs rupestres, sculptés originellement sur des parois rocheuses, représentent le roi dans une scène de combat et à la chasse. Le thème du roi chasseur constitue un référent culturel iranien qui remonte à l’époque sumérienne. Durant les fastes de l’empire sassanide, le roi chassait dans des « paradis » – des parcs clôs dans lesquels des cerfs et des sangliers étaient mis à sa disposition. Mais « attention », prévient Françoise Demange – conservateur en chef des Antiquités Orientales au musée du Louvre et commissaire invité – « le petit cheval (relief de droite à l’entrée de l’exposition) est un graffiti qui date du XII-XIIIè siècle ». Un « défaut » que les estampages de ces reliefs de Taq-i Bustan (près de Kermanshah), réalisés en 1899 par la Délégation française en perse, ont permis de conserver.
Dans la deuxième partie de la période sassanide, les artisans reprennent de manière encore plus explicite les motifs occidentaux pour orner leur vaissellerie. Mais ils les adaptent pour créer des oeuvres originales, répondant aux besoins de leur culture. La vigne – moins luxuriante que les représentations hellénistiques et romaines – et les amours vendangeurs rappellent le culte de Dionysos. Le vase du Musée de Téhéran représente ainsi à sa base les différentes étapes de la production du vin. Sur un autre figurent des jeunes gens maîtrisant des bêtes sauvages – réminescence des travaux d’Hercule. Les figures allégoriques du plat dit d’Anätis personnifient les mois, heures, ou saisons du calendrier romain, sous la forme de danseuses aux courbes rondes et vêtues à la mode sassanide. Cette vaisselle luxueuse est recherchée par la riche communauté chrétienne de Perse.

En revanche, le senmurv constitue un motif typiquement irano-oriental. Cette créature dotée d’une queue et d’ailes de paon, de pattes de lion, et d’une tête de chien est très populaire à la fin de l’ère sassanide et au début de la période islamique. Le senmurv incarne la kwarnah, i.e. la Gloire et la Fortune de la puissante royale. Toute personne disposant d’un objet à l’effigie de la créature contribue à la kwarnah du monarque ainsi que de tous les souverains légitimes d’Iran.

La seconde partie de l’exposition est consacrée aux textiles, soieries, armes et décors en stuc qui ornaient l’intérieur comme l’extérieur des bâtiments royaux. Le travail du stuc, technique héritée des Parthes, évolue sous les Sassanides. Plutôt que de le travailler sur place, les artisans utilisent des moules, qui permettent la fabrication en séries d’éléments séparés. Une fois réunis, ces éléments forment une frise.
Autre innovation architecturale sous les Sassanides, l’iwan – hall ouvert vers l’avant et couvert d’une voûte en berceau -, apparu à l’époque parthe, prend une dimension monumentale (cf. la salle du trône du palais de Ctésiphon).

L’exposition s’achève sur l’influence de l’art sassanide sur le premier art islamique.

La période sassanide représente une étape historique et culturelle majeure de la fin de l’antiquité, encore peu connue du public international. Espérons que cette très belle exposition – la première en France dédiée à cet art créatif et diversifié,- piquera la curiosité de ses citoyens, à l’heure où les relations avec l’Iran actuel ne sont pas au beau fixe…

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