Jusqu’au 30 décembre 2007
Jeu de Paume, 1 place de la Concorde 75008, 01 47 03 12 50, 6€
Le Jeu de Paume a l’honneur d’organiser la première rétrospective en Europe de l’oeuvre d’Edward Steichen (1879-1973). D’origine luxembourgeoise, ce photographe a fait carrière aux Etats-Unis mais c’est à Paris qu’il connaît ses premières heures de gloire.
Pour autant, le jeune Steichen fait preuve d’une vraie nature artistique comme l’attestent ses premières photos, dans sa période pictorialiste. Dès 1899, il expose trois oeuvres au Second Philadelphia Photographic Salon. Ce qui lui vaut une lettre d’encouragement du photographe américain Clarence Hudson White (1871-1925). Un an plus tard, il expose à l’Art Institute de Chicago et obtient le second prix.
Né Eduard Jean Steichen, le jeune homme anglicise son prénom en Edward lorsqu’il devient citoyen américain (1900). En juillet, il embarque pour Paris et photographie les artistes du quartier latin. Il rencontre Rodin qui l’invite régulièrement à déjeuner à Meudon. Impressionné par le portofolio de Steichen, Rodin lui achète plusieurs tirages. Steichen commence alors sa série consacrée aux « Grands Hommes ». Il fait poser Rodin devant son Monument à Victor Hugo et face au Penseur. Il fait un montage des deux négatifs; le résultat est salué par la critique.
A Paris, Steichen expose au Salon du Champ de Mars. Il présente des photographies et des peintures, art qu’il pratique depuis l’enfance. Mais au dernier moment son entrée est refusée à cause de ses photographies. Médium récent, la photographie n’est pas encore considérée comme un art qui mérite récompense. Ce qui déclenche « la furie » du célèbre photographe pictorialiste, Robert Demachy (1859-1936), explique la co-commissaire de l’exposition Nathalie Herschdorfer. R. Demachy crie au scandale et qualifie Steichen d' »enfant terrible de la photographie ». Un surnom qui restera dans les annales.
De retour aux Etats-Unis, Steichen collabore au magazine Camera Work, lancé par A. Stieglitz. Steichen conçoit le logo, la couverture, et la maquete de la revue. Il conseille également Stiegliz sur le choix du papier, de la typographie et des couleurs. En avril 1903, Camera Work sort son deuxième numéro, entièrement dédié à Steichen. Comme le numéro 42/43, mais celui-ci présente l’oeuvre peinte de l’artiste et non son oeuvre photographique.
Puis Steichen retourne en France, avec sa femme (Clara E. Smith) et leur fille Mary. Il achète un terrain à Voulangis (Seine-et-Marne) pour cultiver des fleurs (delphiniums, pavots, pétunias, bégonias, rosiers grimpants, iris) qu’il peint ensuite. Il expose ses plants de delphiniums à la Société nationale d’hoticulture de France et reçoit une médaille d’or.
La Première guerre mondiale marque une période de crise dans la vie de Steichen. Il retourne précipitamment à New York mais sa femme se retire dans le Connecticut avant de retourner en France avec leur seconde fille, Kate. Mary reste avec son père à New York.
En novembre 1917, il apprend la mort de Rodin et assiste à ses funérailles. En 1922, son divorce est prononcé.
Steichen doute de lui, de ses talents.
Mais l’empire Nast s’effondre avec la crise de Wall Street le 29 octobre 1929. Le salaire de Steichen est réduit de moitié. L’artiste se tourne vers Kodak tout en continuant à travailler pour Vogue jusqu’en 1937.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Steichen intègre la Navy. Il prend des vues aériennes des champs de bataille. Les photographies sont impressionnantes pour nous, visiteurs, qui n’avont pas connu la réalité de la guerre.
A partir de 1942, Steichen organise des photographies pour le Museum of Modern Art, New York. L’exposition qui le révèle en tant que commissaire est Family of Man, dont une reconstitution par modélisation en 3D est présentée dans la dernière pièce de l’exposition du Jeu de Paume. L’exposition originale a un tel succès – elle circule dans 38 pays, avec 503 photographies choisies parmi 10.000 images – qu’elle est installée de manière permanente au Luxembourg. Elle est même inscrite au Registre Mémoire du Monde de l’UNESCO en 2004.