Pour une citadine occidentale, la pluie l’embête plus qu’autre chose, surtout lorsque la-dite citadine circule en b’twin! Imaginer que cette thématique puisse faire l’objet d’une exposition il y avait de quoi la laisser au mieux sceptique, au pire sans aucune volonté de se déplacer! Mais comme l’exposition se tenait au musée du quai Branly…
… J’en suis ressortie enchantée! Grâce à une approche transversale, l’exposition met en valeur ce qui rapproche des peuples des quatre coins du monde par leurs rituels et cérémoniels envers la pluie ou ses représentations symboliques. Batraciens, serpents, crocodiles, tortues ; poupées kachina (Arizona), marionnettes « fiancées de la pluie » (Algérie), statuettes des Bhil du Madhya Pradesh (Inde) ; pierres magiques ; arc-en-ciel, nuages, tonnerre – tous ont pour rôle d’invectiver la pluie. Phénomène que l’homme ne comprenait pas et qu’il ne domine toujours pas.
Il fallait donc bien attribuer une explication à cet élément naturel qui nous tombe sur la tête! Chez les Anciens, la pluie assure le lien entre le supra-monde et l’infra-monde. De là découle toute une cosmogonie assortie de son panthéon de divinités. Zeus (mythologie grecque) ou Indra (hindouisme) sont des faiseurs de pluie avec pour attribut la foudre. Chez les Aztèques, c’est Tlaloc, associé à la déesse Chalchiuhtlicue, qui assure la venue et le contrôle de la pluie. Dans la Chine impériale, l’empereur disposait du même pouvoir. Quant aux Yoruba du Nigéria, ils célèbrent le puissant dieu de l’orage Shango, les Fon du Bénin en appellent à Hevioso, les Songhaï du Mali bénissent Dongo.
La musique joue également un rôle important dans ces rituels. Les sonnailles sont portées au creux du genou par les danseurs Hopi (Indiens du Nouveau-Mexique) afin de constituer une image sonore de la pluie.
Indispensable à la vie, la pluie incarne la fertilité des sols et celle des femmes. « Dans les deux cas, l’enjeu est la survie des groupes sociaux », commente Françoise Cousin, ethnologue et commissaire de l’exposition.
Paradoxalement, les motifs figurant la pluie sont là pour la susciter autant que pour l’arrêter. Les hommes des déserts en appellent à elle tout en la craignant car si elle tombe violemment, elle emplit les lits des rivières secs et en déborde. Les masques ciwara des Bamana du Mali ou les masques papillons des Bwa du Burkina-Faso ont pour rôle d’arrêter la pluie. Idem pour les cerfs-volants népalais qui sont censés la faire partir. Et bouclent l’exposition.
Nous voilà donc réconcilier avec la pluie tant on a pris conscience de son importance à travers les rituels d’autrui. Et de repartir, après un saut à la boutique du musée, avec son bâton de pluie, fabriqué à la main en Indonésie sur du bambou, pour entendre son joli son s’égrener dans les mains de ses enfants – bien plus agréable que de la recevoir sur le visage en pédalant!