L’image révélée: premières photographies sur papier en Grande-Bretagne (1840-1860) / Le Daguerréotype français
Aquarelle: atelier et plein air
Jusqu’au 7 septembre 2008
[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Musee-MUSEE-D-ORSAY–tarif-journee–MUOR1.htm]
Musée d’Orsay, niveau 2 salles 69,68,67 / niveau 0 galerie de photographie/ niveau 0 galerie d’arts graphique, 1, rue de la Légion d’Honneur 75007, 01 40 49 48 14/48, 8€
L’exposition américaine Impressed by light, British Photographs from Paper Negatives, 1840-60, fait une escale estivale au musée d’Orsay. En contrepoint de cet événement qui permet au public français de découvrir les toutes premières photographies anglaises, le musée présente une sélection de plaques daguerriennes françaises. Deux concepts opposés, nés de la volonté de capturer l’image, au milieu du XIXe siècle.
Parallèlement, la galerie d’arts graphiques expose une série d’études sur nature par des noms aussi prestigieux que Johan Barthold Jongkind, Eugène Boudin et Paul Signac.
LE CALOTYPE ANGLAIS (1840-60) / LE DAGUERREOTYPE FRANCAIS
La photographie naît des inventions de Jacques Mandé Daguerre (1787-1851) et de J. Nicéphore Niépce (1765-1833) – deux savants français – autant que des recherches du Britannique William Henry Fox Talbot (1710-1782), à la fin des années 1830.
D’un point de vue technique, le daguerréotype se fonde sur le polissage d’une plaque de cuivre, argentée et baignée dans de l’iode – l’iodure d’argent est sensible à la lumière du soleil. Les vapeurs de mercure permettent ensuite de révéler l’image latente. La plaque est lavée à l’hyposulfite puis encadrée afin d’être protégée de l’oxygène de l’air, qui noircit l’argent. L’image retenue est à la fois positive et négative et se révèle à l’observation de la plaque.
De l’autre côté de la Manche, W. Talbot conçoit un procédé sur papier qui repose sur le principe d’un négatif reproductible par contact. Il nomme son invention le calotype, littéralement « la belle image », pour valoriser l’esthétique des oeuvres obtenues.
Les deux procédés permettent de découvrir la représentation de la réalité. Mais le résultat esthétique diffère. Si le daguerréotype offre une clarté vive et miroitante, le calotype renvoie la profondeur du papier avec des ombres veloutées. La plaque de cuivre conserve l’exactitude des lignes et la précision des détails, tandis que le papier offre une composition d’ensemble et des jeux de lumière.
Les premières photographies anglaises ont pour sujet l’Exposition universelle de 1851 avec le Crystal Palace de Joseph Paxton, installé dans Hyde Park. Les oeuvres photographiques révèlent l’influence de la peinture et de la gravure britanniques: paysages vallonnés, ruines – nombreux châteaux d’Ecosse où l’engouement pour le calotype a été sans commune mesure – mais aussi paysages exotiques d’Inde et de Malaisie, possessions de l’Empire britannique en pleine formation.
Quant aux photographes français, ils réalisent de nombreux portraits, capturent des événements nationaux (funérailles du duc d’Orléans à Notre-Dame de Paris, 1842; Barricades de 1848; finition de la Gare de l’Est, 1850) et quelques paysages (Ile de Philae aux abords de la Haute Egyppte; rade de Toulon et de Cherbourg).
Grâce à l’appui de François Arrago, physicien et député des Pyrénées-Orientales, la loi sur la photographie est votée le 7 août 1839. Daguerre, qui s’était associé à Nicéphore (inventeur de l’héliographie), reçoit une rente contre le dévoilement de son procédé. Ce qui permet sa commercialisation et la naissance, d’après les mots du chimiste Gay Lussac, d’un « art nouveau au milieu d’une vieille commercialisation ».
AQUARELLE: ATELIER ET PLEIN AIR
Dès la fin du XVIIe siècle, le programme de l’enseignement académique incorpore la pratique de l’étude sur nature. Plus maniable que l’huile, l’aquarelle permet de mieux saisir l’évolution constante de la nature.
« C’est précieux, très pratique, on peut arriver, en quelques minutes à prendre des notes impossibles autrement – la fluidité d’un ciel, certaines transparences, un tas de petits renseignements qu’un lent travail ne peut donner: c’est si fugitif, les effets », explique Camille Pissaro à Paul Signac, à qui il recommande la pratique de l’aquarelle.
Paul Signac prend note de ses conseils et écrit dans la monographie consacrée à Johan Barthold Jongkind (1819-1891): « L’aquarelle n’est qu’un moyen de notation, une sorte de memorandum, un procédé rapide et fécond, permettant à un peintre d’enrichir son répertoire d’éléments trop passagers pour être fixés par le procédé lent de la peinture à l’huile. Un ciel nuageux est un ensemble magnifique mais qui se déforme perpétuellement ».
Contrairement à la peinture impressionniste – un travail « sur le motif », en plein air -, l’aquarelle sur nature ne suscite pas de polémique. Cette pratique est simplement associée à de la « sténogaphie artistique ». Mais dans les années 1880, la perception de l’aquarelle change. Elle est progressivement considérée comme une oeuvre à part entière. En atteste l’agrandissement de son format qui la destine à la vente et non plus à un simple exercice de prise de notes colorées.
L’accrochage met en valeur des aquarelles d’Eugène Boudin (1824-1898) qui maîtrise particulièrement l’exercise, aux côtés de Jongkind. « Le peintre prenait et jetait sur la table, en lourds paquets, des feuilles exquises qu’il me montrait pêle-mêle, en riant et en s’amusant beaucoup de l’attention respectueuse dont je les considérais. Toutefois, il était visible qu’il y tenait infiniment – en quoi, certes, il avait raison », écrit Louis de Fourcaud, dans l’introduction au catalogue de vente, après le décès du peintre hollandais.
Collectionneur exigent, Isaac de Camondo, s’intéresse plus aux aquarelles de Jongkind qu’à ses peintures. La demande pour les aquarelles de Jongkind est telle que ses carnets de croquis sont démantelés pour en extraire les pages d’aquarelles, en particulier les doubles pages centrales.
L’aquarelle sur nature n’aurait pu se développer sans l’évolution d’un matériel adéquat portatif. Les artistes ont à leur disposition des couleurs prêtes en pastilles ou tablettes, plus tard en tubes, mêlant des pigments et un liant (en général, de la gomme arabique). Les marchands de couleur anglais (Winsor, Newton) dominent le marché français en raison de l’avance de l’école anglaise jusque vers le milieu du XIXe siècle. C’est également valable pour le papier ou les boîtes. Sans oublier l’indispensable « siège de campagne » repliable – le pinchard à trois pied – ou un pliant à quatre pieds dit aussi « siège américain ».
Paul Signac et Paul Cézanne portent l’aquarelle à son apogée dans les années 1900-20. Les deux artistes parviennent à libérer le genre du pittoresque académique et lui confèrent un statut autonome.
Trois petites expositions remarquables tant par la qualité des oeuvres présentées que par leur intérêt d’un point de vue de l’histoire de l’art.
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