René Lalique: Bijoux d’exception, 1890-1912
Jusqu’au 29 juillet 2007
Musée du Luxembourg, 19 rue de Vaugirard 75006, 01 45 44 12 90, 10€
Le musée du Luxembourg consacre son exposition des (futurs!) beaux-jours à l’oeuvre reconnue internationalement de René Lalique (1860-1945), consacré « inventeur du bijou moderne » par le critique d’art Emile Gallé (in Gazette des Beaux-Arts, 1897).
Trois cents pièces d’exception – bijoux, autant qu’études préparatoires, photographies, sculptures, peintures, etc. -, réalisées entre 1890 et 1912, démontrent la qualité et l’originalité des créations Lalique.
René Jules Lalique naît en 1860 à Ay (Marne). S’il est éduqué à Paris, il passe ses vacances dans la campagne champenoise, qui sera l’une de ses principales sources d’inspiration pour la forme de ses bijoux. Guêpes, abeilles, coléoptères, libellules, paons, cygnes, fleurs sauvages, sont autant de motifs que le créateur copie de la faune et de la flore champêtres.
Après un séjour de deux ans en Angleterre, au collège de Sydenham dans le nouveau Crystal Palace, René entre comme dessinateur chez un de ses parents, M. Vuilleret. Doté d’une très mauvaise intuition, ce dernier lui prédit que faire des bijoux ne mène à rien…
Pourtant, René Lalique est remarqué dès 1884 par le bijoutier Alphonse Fouquet (1828-1911) lors de la présentation de ses dessins à l’Exposition nationale des arts industriels, organisée au Louvre. « Je ne connaissais pas de dessinateur en bijou, enfin, en voici un ».
Plus tard, le jeune artisan fournit de manière anonyme des pièces pour les grands noms, tels Vever et Boucheron, qui lui passent commande pour l’Exposition universelle de 1889. Ses premiers bijoux en or ciselé s’inspirent de l’Antiquité et de l’esthétique japonaise. « En 1889, j’avais franchi un échelon et une fois obtenu ce que je cherchais, le travail me devint plus facile ».
En 1890, l’atelier Lalique quitte la rue du Quatre Septembre (IIè arrondissement de Paris), trop restreint pour sa trentaine d’ouvriers, et s’installe au 20, rue Thérèse, à l’angle de l’avenue de l’Opéra. L’artisan en dessine le mobilier, décore les murs et les plafonds de chevauchées de femmes avec l’aide de deux sculpteurs praticiens de Rodin, Alphonse Ledru père et fils.
Précédemment marié à Marie-Louise Lambert (1886), dont il a eu une fille Georgette (décédée en 1910), René n’en tombe pas moins amoureux d’Augustine-Alice Ledru, fille et soeur des sculpteurs, qui devient sa compagne. Il l’épousera en seconde noces en 1902 et en aura deux enfants, Suzanne (1892) et Marc (1900).
Le fin profil d’Augustine-Alice apparaît dès lors sur les pendants de cou, les broches et…les plaques de colliers de chien!
Loin de mener une vie familiale tranquille, René Lalique se surmène pour parvenir à rénover la conception du bijou. « […] en 1892, c’est un effort vraiment extraordinaire que je dus faire pour sortir complètement de ce que je faisais précédemment. Je travaillais sans relâche, dessinant, modelant, faisant des études et des essais techniques de tous genres, sans interruption, avec la volonté d’arriver à un résultat nouveau et de créer quelque chose qu’on n’aurait pas encore vu […] ».
Aux matériaux traditionnels – platine, diamants, pierres précieuses serties – et ornements hérités du XVIIIè siècle – noeuds et rubans -, l’artisan préfère l’or ciselé, l’émail, l’opale, la pierre de lune. Ainsi que des matières alors inédites comme la corne et l’ivoire.
René Lalique poursuit dans l’innovation en réalisant ses premières recherches sur le verre. Elles aboutiront en 1901, consacrées au Salon de bijoux clairs, où le verre occupe une place prépondérante. Ses créations sont exposées dans une vitrine décorée aux quatre angles de « serpents de verre qui ont la transparence claire et grise de coulées de glace ».
Après son second mariage, René et sa famille s’installent dans un hôtel particulier au 40 Cours la Reine (VIIIè arrondissement), qui regroupe son habitation privée, ses ateliers et ses locaux d’exposition. Il construit des dalles de verre pour ses portes d’entrée, appliquant ses recherches pour le bijou à la production industrielle du XXè siècle.
Dans les années qui suivent, Lalique participent à des expositions internationales, en Italie (Turin) et aux Etats-Unis. Un voyage qui se solde par la vente de l’intégralité de ses bijoux au collectionneur Henry Walters! Ils sont aujourd’hui conservés à la Walters Art Gallery, à Baltimore.
En 1905, René Lalique ouvre un magasin dans la cour des grands – la prestigieuse place Vendôme, à Paris. Trente ans plus tard, il ouvrira une autre boutique, rue Royale.
Ses travaux avancés sur le verre – Lalique rachète une verrerie à Combs-La-Ville, à l’est de la capitale (1913) – lui permettent d’entreprendre une coopération fructueuse avec le parfumeur François Coty (1874-1934).
A la fin de sa vie, René Lalique aura une troisième compagne (Marie Anère), après le décès d’Augustine-Alice, dont il aura deux autres enfants, Jean-Raymond (1925) et Renée-Jeanne-Georgette (1927).
Il cumule les expositions, à Paris, à Londres où il est représenté par les ateliers de Breves, à New York (Metropolitan Museum of Art), à Milan (Biennale de 1936). Et les réalisations: maître-autel, table de communion et vitraux de la chapelle de la Vierge Fidèle (Délivrande, dans le Calvados); luminaires et fontaine de la galerie Arcades des Champs-Elysées (1926); fontaines du Rond-Point des Champs-Elysées (1932); décor pour l’immense salle à manger des premières classes du paquebot Normandie (1935), etc..
Parmi ses fidèles clients et admirateurs figurent l’actrice Sarah Bernhardt, la comtesse de Béarn Martine de Béhague (1869-1939), la marquise Arconati-Visconti (1840-1923), le financier arménien Calouste Gulbenkian (1869-1955), et l’aristocratie russe.
En 1900, René Lalique est promu officier de la Légion d’Honneur.
Bien plus qu’un artisan, René Lalique se révèle comme un véritable artiste du bijou qui bouleverse les codes et participe à la révolution esthétique de la fin du XIXè siècle. Que l’on aime ou non les motifs de ces bijoux anciens aux antipodes du style épuré contemporain, force est de reconnaître l’harmonie et la sensualité de l’univers du créateur. Un raffinement décuplé par la scénographie de l’expositon, conçue par Hubert Le Gall, en forme d’écrin, qui met en valeur la méthode de travail unique de R. Lalique, sa fascination pour la féminité, et sa sensibilité tant pour la nature que pour le Japonisme et le Symbolisme.
Splendide exposition ! Comme toujours le Palais du Luxembourg a revêtu son plus bel habit pour nous faire rentrer dans un nouvel univers.
Dommage que Lalique ne soit pus de nos jours ce que le créateur avait crée !
A noter : les cartes postales des bijoux sous fond transparent !
merci. i have heard about this show, and wish i could attend. but i have not seen the photograph of that branch with birds before. isn’t it amazing…
Exposition de grande qualité, très fascinante et suggestive, mais aussi rigoureuse dans sa présentation de l’artiste et de son temps. Une grande réussite.