L’Or des Thraces, Trésors de Bulgarie
Musée Jacquemart-André, 158 boulevard Haussmann 75008
14 octobre 2006 – 31 janvier 2007
Rens.: 01 45 62 11 59
Grâce à un prêt exceptionnel des musées de Bulgarie, le musée Jacquemart-André accueille quatre trésors prestigieux de la civilisation thrace, dans sa période la plus brillante (VIè – IIIè siècles av. J.-C.), lorsque régnaient les dynasties royales thraces, contemporaines de la Grèce classique.
Une centaine de pièces en or et argent compose chacun des quatre trésors – Rogozen, Borovo, Letnitsa, et Panagurishté (nom des sites de leur découverte). Bijoux, vaisselle d’apparat, armement ou harnachement sont présentés selon une scénographie étonnante bien qu’appropriée: la reconstitution d’une tombe thrace.
Les trésors présentés proviennent de fouilles archéologiques les plus récentes (été 2004) des tumuli – buttes de terre recouvrant une sépulture – de la Vallée des Rois (200km à l’est de Sofia). De manière plus insolite, en 1974, un agriculteur bulgare, du village de Borovo, découvre au hasard d’un sillon, rhytons, coupe et cruche en argent!
Qui étaient les Thraces?
Présents dans la péninsule balkanique entre le Danube et la mer Egée – l’équivalent de la Bulgarie aujourd’hui – les Thraces développent une civilisation pointue entre le IIè millénaire avant Jésus-Christ et les premiers siècles de notre ère. Ils sont ensuite intégrés à l’empire romain, qui est déjà parvenu à soumettre la Grèce. Le gladiateur Spartacus est l’un des derniers Thraces célèbres.
Les Thraces se composent d’un ensemble de tribus guerrières, qui se battent entre elles et contre les pays frontaliers. Toutefois, ces affrontements permettent des échanges commerciaux et culturels. Ainsi, les Thraces transmettent aux Grecs la technique du travail du fer (seconde moitié du IIè millénaire av. J.-C.), tandis qu’eux-même s’inspirent de la mythologie grecque – mythe d’Orphée, cycle d’Héraclès, ou culte de Dionysos – pour illustrer leurs objets décoratifs. Les Thraces communiquent aussi avec les Scythes indo-iraniens (nord-est), les Celtes sur le Danube (nord-ouest) et les Perses achéménides (sud).
Comment étaient-ils organisés?
Chaque tribu obéit à un roi-prête tout puissant, qui se déplace constamment, accompagné de son armée, passant d’une résidence royale à une autre afin de mieux contrôler ses territoires. Au Vè sicèle av. J.-C., le grand historien grec Hérodote témoigne de la puissance des Thraces: « La nation des Thraces est, avec celle des Indiens, la plus importante au monde. S’ils avaient un seul roi et s’ils pouvaient s’entendre entre eux, ils seraient invincibles, et d’après moi, beaucoup plus puissants que toutes les nations ».
Homère, à qui l’on doit les textes les plus anciens au sujet des Thraces, évoque dans L’Iliade, les puissants rois Rhésos, Peiroos, et Acamas, comme nous l’explique un extrait du très bon film Orphée, un musée virtuel de Zlatina Rousseva, qu’il faut prendre le temps de regarder à mi-parcours de l’exposition.
De quoi vivaient-ils?
Selon Homère, la Thrace est « une terre grasse et riche en brebis ». Si l’agriculture est développée, les activités portuaires et maritimes permettent de tirer profit de la vente de nombreux produits ou de la perception de taxes sur les minerais, le blé, le bois, le bétail, et …les esclaves.
La maîtrise du travail des métaux atteint son apogée entre les VIè et IIIè siècles avant Jésus-Christ, sous l’égide du premier grand royaume thrace – celui des Odryses (milieu du Vè siècle av. J.-C.). Les Thraces viennent chercher l’or dans les mines du massif du Pangée, à l’est de Thessalonique. Dans le contexte d’une culture héliocentrique, l’or permet d’accéder à l’éternité.
Quels dieux priaient-ils?
Les Thraces vénèrent tout autant Artémis ou Grande Déesse mère, Dionysos ou Zagreus en thrace (le dieu-Fils) et Arès (le Fils du Fils) issu du mariage sacré entre Artémis et Dionysos. Les rois-prêtres ont le statut d’Arès.
Orphée, poète-devin, est le disciple de Dionysos et le médiateur entre les dieux et les hommes. Il est l’initiateur de la sagese et de l’immortalité pour ceux qui ne sont pas d’essence divine.
La religion orphique se fonde sur la croyance que le dieu meurt démembré pour renaître et faire recommencer les cycles de mort et de résurrection, exprimés par les motifs figuratifs circulaires et les couleurs rouge (mort), noir (tombe, entrailles), blanc (renouveau, Au-Delà).
Que sont le quatre prestigieux trésors?
Le trésor de Borovo (salle 1) se compose d’un service de pièces en argent, qui datent du IVè siècles av. J.-C.. Les archéologues émettent l’hypothèse qu’il s’agisse d’une offrande destinée à calmer les fléaux naturels à la suite des séismes catastrophiques du IIIè siècle av. J.-C..
Le trésor de Rogozen (salle 2) comprend des cruches (54), des tasses (3) et de nombreuses phiales – coupes à libation sans anse ni pied, munies en leur centre d’une saillie centrale arrondie – en argent, dont le poids total s’élève à 20kg. La variété des ornementations décoratives confère à ce trésor une forte valeur historique. Les figures géométriques alternent avec des rameaux d’arbres, des pampres de vignes, des fleurs de lotus, des figures d’animaux fantastiques (lions ailés, griffons, pégases, boucs ailés) et réalistes (chiens, panthères, oiseaux).
Le trésor de Letnitsa (salle 3) se distingue par son vase en bronze, qui enfermait des appliques d’un harnais de cheval et un mors en fer – des pièces datant du IVè siècle av. J.-C., destinées au cheval de selle de l’aristocratie.
Enfin, le célèbre trésor de Panagurishté (salle 6) – réputé pour sa perfection artistique – est ici présenté dans son intégralité. Il permet de comprendre l’organisatin des offices sacrés thraces.
Des vases en or de qualité (6,164kg) et aux formes travaillées étaient destinés aux festivités et libations cultuelles. Parmi ces vases on compte quatre rhytons (vase à boire d’apparat en forme de corne, à une anse, percé d’un trou par lequel le liquide s’écoule, et dont l’extrémité se termin par une tête d’animale ou humaine), trois cruches en forme de têtes féminines et dont les anses représentent un sphinx, une phiale et une amphore, décorée de scènes mythologiques grecques (Jugement de Pâris, siège de Troie?, et autres épisodes de la guerre de Troie). Ces motifs laissent penser que le trésor a été fabriqué en Grèce à l’intention d’un riche seigneur thrace.
Une exposition sublime tant dans la présentation de ces objets de grande qualité que dans sa conception scénographique – effet de contraste entre la pénombre de la tombe et le brillant de l’or sous vitrine. Le Musée Jacquemart-André, qui se veut l’équivalent de la Frick Collection de New York, nous fait ainsi découvrir un univers extrêmement raffiné, aux confluents de l’Occident et de l’Orient.
Très bon texte, merci
Merci à vous :)
Article très intéressant.
Merci.
pourquoi occulter l’apport essentiel des africains à la construction de cette civilisation?
Le tresor que vous venerez aujourd’hui et avec fierté n’est que la résultante du don des savoirs africains à l’europe, notamment aux « grecs »!
Bravo « pas besoin », encore un commentaire intelliget d’un idéologue afrolâtre. Que vient faire l' »Afrique » (et quelle Afrique d’ailleurs?)chez les Thraces et dans les objets présentés dans l’article? On se le demande… Tous ces objets thraces révèlent en partie une influence asiatique via la Grèce, mais ils n’ont rien d’africains. il faut être absolument ignorant ou négationiste (au sens de négation des faits historiques tangibles) pour prétendre le contraire.
Il y a une faute dans le texte « ….les Thraces transmettent aux Grecs la technique du travail du fer (seconde moitié du IIè millénaire av. J.-C.), tandis qu’eux-même s’inspirent de la mythologie grecque – mythe d’Orphée, cycle d’Héraclès, ou culte de Dionysos – pour illustrer leurs objets décoratifs… »
>> Le mythe d’Orphée, le culte de Dionysos sont thrace et non grecs !!!!
Bonjour,
Merci pour votre commentaire (un peu abrupt tout de même!), mais pourriez-vous citer une source étayant vos propos ?
A ma connaissance, Orphée (le personnage) est certes originaire de Thraces mais le myhte lui-même est considéré comme appartenant à la mythologie grecque.
Sophie
Je suis d’origine Thrace…et jusque preuve du contraire nous les Thraces somment comme bien nombre d’autres peuplades issus d’un corp Grec tout comme les minoeen, les doriens , les achéen..etc… notre alphabet est commun aux autres peuple grecques nos dieux antiques sont semblables a nos frères grecs…et si je dis frères grecs cela est un comportement typiquement grec de dire que l’on est Thrace,Crétois,Capadocien, Ephesien, Epirotes , Macédoniens …et rares sont les fois ou nous employons notre appelation commune càd « Hellenes » !
cela n’est pas nécéssaire puisque l’on sait que nous somment des Hellenes pas besoins de se le répetter .. dailleurs nos frères siciliens n’hesiteront jamais a dire Siciliens au lieu d’italien …pourquoi ? car ils sont belle et bien grecs d’origine..ils continuent a se nommer comme le font tous les Grecs..daprès leur peuplade. le temps fini par les Latiniser complètement et leurs faire oublier leurs origines…mais les traditions culturelle ne trahissent pas..malgré les siècles..Danses en l’honeur du Dieu TARANTOS…la tarantella…..Les centaines de temples Hellenes en son sol…
Nous les Thraces ne somment pas des Bulgares et encore moins des Turcs.. mais issus d’une branche Grec (hellene).. nous combatirent selon Homeres nos frères grecs,..(Thessaliens, Spartiates, etc..) lors de la gerre de Troie avec nos frère Troyens contre nos frères hellenes pour ne pas changer..nous autres Hellenes avons l’habitude de se quereller depuis des siècles et cela ne cesera jamais..
mais nous restons malgré tout tous GRECS…et s’en est assez des pseudo historien moderne qui essaie de prétendre que les Thraces ne sont pas un peuple ayant une origine Hellenes ou que les Macedoniens ne sont pas des Hellenes, ou que les siciliens, napolitains, n’ont pas une origine Hellenes;… l’ADN ne trompe pas…et il révele bel et bien un même sang communs et non une origine Africaine ou martienne! La science vient au secours de la réalité historique! A bon entendeur..
…a ne pas confondre grecs et hellenes
le dernier commentaire a plus de place dans un discours politique de demagogue que dans un contexte historique
on ne peut pas rattacher post factum a la Grece des civilisations qui depassent largement son contexte comme la Thrace , la Macedoine antique ( pas l’etat actuel ) , la Crete , Mycene etc .
La Grece antique et la Grece d’aujourd’hui n’not pas grand chose en commun , encore moins les hommes qui peuplent ses terres , tout le reste c’est de la propagande cheap qui sert a donner un peu de fierte et d’unite a une peuplade sans visage
En tous cas …les arguments fusent,les historiens recusent,et moi,humble terrien qui est né en france,he bien,je file en grece bientot…ce ne sera que la 25eme30eme fois…peu importe d’ailleurs.Mais la ,je file dans le nord,pas notre chnord a nous ,mais la macedoine,la thrace,hors des sentiers battus et des plages sales et surpeuplees.Au fait,si vous avez un bon guide (bouquin bien sur…suis je bete!)ou tout autre renseignement qui me fasse decouvrir un lieu,un endroit que sais je…?merci de partager vos connaissances avec un humble ,mais fier amoureux de la grece!i cardia mou iné stin Ellada! yassasse.Mikaelis
100% avec Quentin, « Pas besoin », c’est quoi ce besoin impérieux de vouloir tout associer à l’afrique ?, encore si cela était le cas, on pourrait tous en discuter, mais là je crois que dans le cas de cette civilisation Européenne d’origine Indo-Européenne il n’y a simplement aucune « trace » de civilisation africaine (du moins pas dans la période évoquée dans cette article).
Pas sûr, pas sûr qu’il n’y ait aucun lien entre Thrace et l’Afrique. A preuve, cet exemple (tardif me direz-vous mais tout ou presque est affaire de compilation de sources antiques) : le récit de pélerinage en Terre sainte de Bernard von Breydenbach (1486) parle en effet de « (…) deux galiotes [navires] vénitiennes venant d’Afrique, galiotes qu’on appelle de Thrace, abordèrent à Alexandrie pour charger des substances aromatiques (…) » (soit en latin : « Die vero XXX octobris due quedam alie venetiane galee venientes de Africa quas galeas de Trassico cognominant portui applicuere Alexendrino pari modo ibi onerande (…) »). Le traducteur français de cet ouvrage (1489/90), Jean de Hersin, a traduit par : « Le 30 octobre quelque autres galées [navires] vénitiennes venant du pays d’Affrique (sic), qu’ils appellent de trafic, arrivèrent au port d’Alexandrie (…) »… Il ne me semble pas que ce brave homme fut afrolâtre et encore moins ignorant…
Vous parlez seulement du peuple grec et bulgaire. Mais aussi au noprd du Danube, un peuple (roumain)a son origine thrace. In est interessant de comparer leur mythes (du Zalmoxis) avec le mythe de Jesus.
Bonjour Thraks,
J’ai savouré votre article. L’amalgame est monnaie courante.
Qui plus est, les « non-dits » de l’histoire et l’hypocrisie politique
Merci à vous