Depuis seulement une trentaine d’année, la Grèce du Nord dévoile ses trésors archéologiques. Le musée du Louvre présente les derniers vestiges dans une exposition qui retrace l’histoire de la Macédoine antique. Et rend hommage au plus célèbre de ses souverains, Alexandre le Grand, élevé de son vivant, au rang de héros voire de dieu.
Quit dit exposition archéologique, dit sucession de pièces antiques, de façon pléthore – le musée du Louvre ne lésine pas sur le numéraire! Cinq cents pièces sont exposées. Si les premières oeuvres émerveillent, les dernières lassent.
Pourtant, l’exposition est prometteuse avec, dès l’accueil, la reproduction d’une magnifique mosaïque à l’échelle 1:1. Réalisée à partir de galets de rivière, selon une technique antique, elle représente une chasse au lion, dont l’original (dernier quart du IVe siècle), est conservé au musée archéologique de Pella. Ville où est né Alexandre le Grand en 356 avant J.-C.
A peine passé le seuil de l’exposition est présentée la dernière découverte archéologique – une couronne de feuilles de chêne en or (seconde moitié du IVe s. av. J.-C.) – retrouvée au sanctuaire d’Eukleia à Aigai (actuelle Vergina), en août 2008. La finesse de son feuillage, l’harmonie et la symétrie de sa composition en font un ensemble exceptionnel. Il s’agit d’une offrande symbolique qui exprime la relation spéciale de la famille royale macédonienne avec Zeus. Le fait qu’elle soit enfouie dans l’ensemble funéraire d’un jeune membre de la dynastie des Téménides laisse supposer que le jeune défunt était Héraclès. Fils illégitime d’Alexandre et de Barsine, il est assasiné par le futur souverain, Cassandre de Macédoine (358-297 av. J.-C.). Mais les études sont encore en cours…
Autre pièce remarquable et mystérieuse: le casque en bronze et masque en or (vers 520 av. J.-C.). Casque dit de type « illyrien » car les premiers exemplaires ont été découverts dans les nécropoles d’Illyrie. Celui-ci vient en réalité du Péloponnèse. Il domine dans presques toutes les nécropoles macédoniennes. L’ouverture faciale du casque est couverte par un masque constitué d’une feuille d’or assez épaisse. Dans les tombes masculines de Sindos, ces masques sont habituellement de forme rectangulaire. Dans les tombes féminines, ils sont hexagonaux ou trapézoïdaux avec une tendance vers le cercle.
Viennent ensuite la présentation des multiples découvertes, notamment de la tombe inviolée de Philippe II (père d’Alexandre), et de celle d’Eurydice (grand-mère d’Alexandre). Les peintures présentent une réélle virtuosité technique: fusion optique des couleurs, clair-obscur, perspective. De même que les objets d’orfèvrerie et les vases dont la polychromie et la composition picturale impressionnent. Les Macédoniens contrôlaient ainsi le travail de la céramique, du métal, de l’ivoire et du verre transparent, inventé sous le règne de Philippe II (359-336 av. J.-C.) L’élégance des statues est attestée par la figurine en terre cuite d’Eros endormi et du portrait d’Alexandre. Qui est reconnaissable, selon Plutarque, à l’inclinaison de sa tête, les yeux tournés vers le ciel, ses pommettes hautes et à l’anastolé – cette disposition particulière des mèches de sa chevelure épaisse au-dessus du front.
J’ai également apprécié la présentation en 3D des vues actuelles de la maison de Dionysos à Pella avec ses salles de banquet, décors et mosaïques décoratives.
La dernière partie est supposée être le point d’orgue de l’exposition. Elle m’a laissée de marbre. Elle évoque la colonnade des Incantadas (les « Enchantées » en espagnol) – colonnade à étage bâtie au sud de l’agora romaine de Thessalonique. Les piliers sculptés présentent des restes de personnages issus de la mythologie grecque. Le titre provient d’une légende selon laquelle Alexandre le Grand aurait été l’amant de la femme du roi de Thrace dont le palais se trouvait d’un côté du portique (celui d’Alexandre, de l’autre). Le roi aurait appris qu’Alexandre devait rejoindre sa bien-aimée. Il fit jeter un sort sur le portique. Prévenu, Alexandre ne se présente pas, tandis que le roi passant sous le portiqu, est pris à son propre piège et se fait changer en pierre.
Il faut reconnaître qu’il y a eu un réel effort scénographique et une ingénieuse mise en valeur des pièces pour reconstituer leurs supports, souvent absents ou brisés. Toutefois – je pense à un débris de bouclier, notamment -, je me demande si cela vaut le coup d’exposer certaines découvertes, qui si elles sont indispensables à la mémoire collective et importantes d’un point de vue scientifique, ont-elles réellement besoin de sortir de leurs réserves muséales quand il n’en reste que trois miettes?