Jade

Cabinet de curiosités miniature. Chine Dynastie Qing, marque et règne de Qianlong (1736-1795) © Musée national du Palais, TaipeiDes Empereurs à l’Art Déco

Jusqu’au 16 janvier 2017

Musée Guimet, 6 place d’Iéna, Paris 16e

Le musée national des Arts asiatiques – Guimet (MNAAG) présente une exposition sur le jade. Pierre mythique, objet de fascination et de pouvoir des souverains, des Empereurs de Chine aux années 1920.

En chinois, le caractère yu désigne non seulement le jade mais évoque également toutes les « belles pierres ». Le parcours débute avec une pierre à toucher, une brute et une polie.

La gamme des couleurs du jade varie du blanc au vert sombre voire au noir, du mauve à l’orange, du vert grisé au céladon, en fonction des impuretés dans la pierre (présence de fer ferrique, manganèse ou graphite). La coloration n’est pas toujours naturelle car dès l’Antiquité des techniques sont utilisées pour en alterner la gamme chromatique. Par exemple, en enfouissant le jade sous la terre ou, à l’inverse, en l’exposant à la chaleur.

Écran de table : les sept sages de la forêt de bambous Gravé au verso d’un poème impérial Chine Dynastie Qing, règne de Qianlong (1736-1795) Jade MNAAG, Paris, ancien fonds, MG 2401 © RMN-Grand Palais (musée Guimet, Paris) / Thierry Ollivier

Incarnation du bien pour Confucius, le jade est particulièrement associé depuis l’Empereur Qianlong (r. 1736-1795) à la beauté, la vertu et au prestige. C’est sous son règne que l’empire chinois atteint sa plus grande superficie géographique. Il s’étend au nord-ouest du pays, soumettant des territoires islamiques (Turkestan oriental ou Xinjiang – « nouvelle frontière »), qui lui donnent accès aux gisements abondants de jade des rivières de la région du Khotan. Qianlong fait graver des poèmes dédiés au jade sur des objets pour matérialiser sa victoire. Il fait également inscrire dans des « livres de jade » son interprétation de l’histoire du bouddhisme, dont il assure le développement au sein de l’Empire.

Paire d’écrans de table à décor d’éléphant et de prunier. Chine, Dynastie Qing, règne de Qianlong (1736-1795) Jade © Musée national du Palais, Taipei

Le jade n’est pas réservé à l’Empereur – intermédiaire sacré entre la Terre et le Ciel -. Les mandarins administrant l’empire portent tablettes et ceintures en jade, représentatives de leur rang et de leur pouvoir. Leur table de travail est recouverte d’objets sculptés, aux décors végétaux ou animaliers (éléphant, ours, poisson ; plus tard, tigre, dragon, phénix).

Paire d'écrans circulaires. Chine, Dynastie Qing (1644-1911), 18e siècle. Jade, bois (socle) (C) Château de Fontainebleau, Dist. RMN-Grand Palais / Thierry Ollivier

Le MNAAG rassemble pour la première fois deux collections impériales de jade en provenance du musée national du Palais de Taipei (Taïwan) et du Château de Fontainebleau. En effet, en 1860, les armées françaises et britanniques ont pillé le Palais d’été de l’Empereur. Les trésors sont transférés à Napoléon III, avant que le feu ne soit mis au Palais. Exposés à Paris – au grand dam de Victor Hugo qui s’insurge contre cette perte architecturale et dénonce les agissements des armées étrangères -, les objets précieux sont ensuite installés dans les salons de l’impératrice à Fontainebleau et dans le musée Chinois qu’elle ouvre en 1863. On y trouve notamment du matériel de lettrés (coupe lave-pinceaux, poids en forme de fruits) et des pièces affectionnées par Qianlong (écran de table sculpté de ses poèmes).

 

Plus tard, les sultans de Samarkand, les souverains moghols et les shahs safavides d’Iran adulent cette pierre, qui prend la forme d’animaux, de bols, d’épées.

Collier Cartier Paris, commande de 1934 Vint-sept boules de jadéite impériale dont les diamètres varient de 15,4 à 19,2 mm Platine, or, diamants taille baguette et 8/8, rubis suiffés calibrés Provenance Barbara Hutton, Collection Cartier, NE 53 A 34 Photo: Marian Gérard, Cartier Collection © Cartier

Au début du 20e siècle, la maison Cartier, s’empare des motifs Art Déco pour transformer le jade en joaillerie d’exception. Notamment portée par les Américaines Mona Bismarck (1897-1983), comtesse et mécène, et Barbara Hutton (1912-1979), héritière des magasins Woolworth, dont le collier est composé de 27 boules de jadéite, au fermoir serti de platine, d’or, de diamants et de rubis.

L’exposition se termine sur un grand paravent de laque, produit sous le règne de l’empereur Kangxi (1662-1722), dont le pourtour est incrusté de jade. Ce type de mobilier, qui transite en Inde par la côte de Coromandel, est recherché par l’aristocratie européenne au 18e siècle. Il fait ensuite office de lambris pour les salons des hôtels particuliers parisiens. Coco Chanel découvre les paravents de Coromandel dans les années 1910 et se fait maintes fois photographier devant. Elle en possède jusqu’à 32 ; ils sont toujours présents dans ses appartements de la rue Cambon et au Ritz.

Une exposition fabuleuse pour ceux qui aime l’Orient et les histoires de belles pierres !

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