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Hommage au génie plastique de la Nature à la MEP

Bruce Davidson: La Nature de Paris (Etage 1)
Marc Fumaroli: Le cuir des arbres (Etage 0, au fond du café)

Jusqu’au 2 septembre 2007

Maison Européenne de la Photographie, 5/7 rue de Fourcy 75004, 01 44 78 75 00, 6€ (entrée libre tous les mercredis à partir de 17h).

Deux expositions sur l’esthétique des arbres, (même) en milieu urbain, sont présentées à la Maison Européenne de la Photographie (MEP). Tandis que Marc Fumaroli s’attache à photographier l’expressivité du « cuir » des arbres, Bruce Davidson nous propose un regard exceptionnellement neuf sur Paris à travers les espaces verts de la Ville des Lumières. Un sacré défi.

Les photos de Marc Fumaroli (né en 1932 à Marseille), ancien professeur au Collège de France et membre de l’Académie française (élu en 1995), se regardent avec émotion, silence, émerveillement. L’illustre homme – il a reçu de nombreuses distinctions républicaines, françaises et italiennes – juxtapose des gros plans de troncs. Ce « cuir des arbres » révèle la beauté de la nature à l’état pur, réalisant des « auto-gravures ou peintures » plus ou moins figuratives. Ici on reconnaît un visage, là on y voit une forme animalière. D’autres sont beaucoup plus abstraites.
« Silencieuse, sans défense, leur beauté [des arbres] donne sans rien demander en échange, et ils dispensent sans compter, outre leur ombre, leur feuillage, leurs fleurs, leurs fruits, l’admirable élan qui les enracine dans la terre en même temps qu’il les porte vers la lumière et le ciel: un admirable exemple d’attitude d’âme » (Marc Fumaroli).

La plastique des arbres a également été le moteur de la créativité artistique de Bruce Davidson (né en 1933), célèbre photographe américain travaillant pour l’agence Magnum.
Alors que Paris a déjà été maintes fois immortalisé par des artistes aussi renommés qu’Eugène Atget (1857-1927), Henri Cartier-Bresson (1908-2004), Willy Ronis (né en 1910), Robert Doisneau (1912-1994) et Brassaï (1899-1984), Bruce Davidson ose répondre au challenge de la commande de la MEP. Et nous offrir un nouveau regard sur Paris.

Paris « c’est la ville des grands musées, des façades classiques, des monuments stoïques et des ponts gracieux qui stimulent l’oeil, informent l’esprit et vivifient l’âme. Mais il y a un autre Paris: celui des parcs et des jardins publics qui émaillent la ville, celui des jardins secrets et intimes, cachés derrière des murs inacessibles », confie l’artiste.

C’est sous cet angle verdoyant, qui prolonge sa série de Central Park à New York (1996), que Bruce Davidson crée une vision de Paris originale, poétique et intemporelle. Car cette nature silencieuse fait oublier le grouillement de la ville ; dans ses photographies, le temps semble s’être arrêté.

La vue des arbres en contre-plongée met en valeur leur architecture végétale qui, s’éprend de la Tour Eiffel, abrite des amoureux (parc de Vincennes), se noue en branches pour ne laisser passer que quelques reflets du soleil (jardin du Luxembourg). La perspective en 360° saisit l’avancée des canards autour d’un îlot feuillu (parc Montsouris). Tandis que la vue en plongée permet de capturer incognito des visions de jardins secrets, ensemencés de rose (derrière Notre-Dame).

Un travail qui se fait au fil des saisons. « En automne, je monte l’escalier en pierre du parc de la Turlure à Montmartre. Et là, je trouve des fleurs sauvages à côté des branches nues d’un arbre noir. Le dôme du Sacré-Coeur émerge, telle la pleine lune au-dessus du désert. Alors, dans cette rue ensoleillée, congestionnée, et c’est le paradoxe de cette capitale, je sens la Nature m’habiter. La flore donne un sens supplémentaire, un sens inattendu, à la Ville Lumière, à la Ville de l’Amour. C’est ça, la nature de Paris ».

Une vision qui en surprendra plus d’un, la capitale n’étant généralement perçue que sous l’angle des emboutaillages et de la pollution urbaine!
Pourtant, au-delà de cette affirmation on ne peut plus polémique – mais à laquelle j’adhère sans hésiter – on peut objectivement affirmer que B. Davidson a su relever le défi d’apporter une vision de Paris différente, sensible, vraie.

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