Collections du Musée des Arts Décoratifs
MAD, 107 rue de Rivoli, Paris 1er
Jusqu’au 12 décembre 2021
Enfin un article sur une exposition ! Pour ce premier retour au musée, j’ai pu arpenter les salles du Musée des Arts Décoratifs pour une présentation inédite de son fonds de photographies. Un parcours édifiant, imaginé par un jeune commissaire passionné par son sujet, Sébastien Quéquet (attaché de conservation en charge des collections photographiques, département des Arts graphiques).
Le directeur du MAD, Olivier Gabet, a donné pour directive à ses commissaires de mettre en valeur les fonds du musée, peu connus du public. Après « Dessins sans réserve », malheureusement peu exposés à cause des différents confinements, voici « Histoires de photographies ».
L’idée était de montrer ce fonds très riche – plus de 350.000 phototypes des années 1840 à nos jours – pour en révéler 400 tirages originaux et négatifs sur plaque de verre. Ils narrent à la fois l’histoire de la photographie et celle, plurielle, de ceux qui les ont faites, au gré des évolutions historiques, politiques et sociales.
Le parcours est scindé en six parties qui correspondent aux différents usages de la photographie. De son premier rôle pédagogique à sa reconnaissance en tant qu’art en soi, en passant par sa documentation de la modernité, ou encore son influence dans les domaines de l’architecture et de la mode.
Parmi les « pépites », on découvre les photogrammes en cyanotype (réalisés avec des sels de fer qui, une fois exposés à la lumière, apportent un fond bleu) de Henri Bodin. Ses décors d’algues me rappellent les formes végétales stylisées de Matisse. Les premières photographies d’Eugène Atget, de plantes, sont exposées face aux albums de Jules Maciet. Ces derniers réunissaient (des années 1880 aux années 1980) des photographies collées sur divers thèmes (mode, décoration, sculpture antique, etc.). Ils ornent encore aujourd’hui les murs de la Bibliothèque du MAD. Ces premières photos servent de modèles surtout à l’industrie textile et industrielle (pour les papiers peints).
La section suivante évoque l’internationalisation de la photographie avec le développement des expositions universelles mais aussi de la colonisation. D’où des photographies d’Égypte, des Berbères du Maroc et d’Algérie, de Turquie, de Jérusalem. S’il n’y a pas d’images d’Indochine, je m’attarde sur les trésors nationaux des temples de Nara et celles rehaussées de couleurs à la main d’un samouraï portraituré par Raimund von Stillfried.
Dans les années 1920-30, la photographie connaît un essor fulgurant grâce aux éditeurs qui passent des commandes pour, notamment, les revues de mode et d’architecture (Art et Décoration, L’Architecture aujourd’hui, ou Connaissance des Arts, qui va constituer son propre fonds photographique). La photographie sert également à documenter le patrimoine en péril (Henri Le Secq, Frères Bisson, Édouard Baldus) et la modernité comme les lampadaires qui envahissent les rues (Charles Marville), ou les grands chantiers du Sacré-Choeur et du bâtiment du Crédit Lyonnais (L. E. Durandelle).
1916 marque la toute première exposition muséale consacrée à la photographie. Celle de 1936, à dimension internationale, dans les locaux actuels du MAD, consacre le médium comme un art à part entière. Dans cette section figurent les grands prêtres de l’époque : Willy Ronis, Robert Doisneau, Janine Niépce, et Henri Cartier-Bresson qui bénéficie d’une exposition personnelle au Musée des Arts décoratifs en 1967.
La dernière section est consacrée à la mode. Des vêtements de scène aux mannequins présentant des modèles de couture (maison Poiret, Madeleine Vionnet) en passant par les habits du quotidien et leurs chapeaux. Eh oui, à l’époque, on ne sortait pas tête nue ! Horst P. Horst, Cecil Beaton, David Seidner, mais aussi Valérie Belin, Bettina Rheims font partie du fonds.
Une exposition à valeur sûre pour qui aime la photographie !