Man Ray et la mode
Jusqu’au 17 janvier 2021
Musée du Luxembourg, Paris 6e
Gabrielle Chanel – Manifeste de mode
Jusqu’au 18 juillet 2021
Palais Galliera, Paris 16e
Pour la première fois, le musée du Luxembourg organise une exposition consacrée à la mode, à travers les photographies publicitaires de Man Ray. Parallèlement, le Palais Galliera, pour sa réouverture après deux ans de travaux, opte pour un sujet fédérateur : l’icône Gabrielle Chanel dont l’intemporalité des créations nous surprendra toujours.
AU MUSEE DU LUXEMBOURG
Emmanuel Radnitsky dit Man Ray (1890-1976), né à Philadelphie, était un protagoniste du surréalisme français. Il est légendairement associé à Alice Prin dite Kiki de Montparnasse, sa muse, sublimée dans Noir et blanche, posant sa tête sur une table et tenant dans une main un masque africain. Ses photographies de mode l’ont menées au sommet de sa gloire. Pourtant, l’artiste avait tout fait pour occulter cette partie de son travail et elles n’avaient jamais fait l’objet d’une exposition. Le musée du Luxembourg s’y attelle, espérant attirer un public plus jeune.
Marcel Duchamp introduit Man Ray dans le milieu de l’avant-garde lors de son arrivée à Paris en 1921. Pour gagner sa vie, Man Ray photographie le gratin mondain avant de glisser peu à peu vers le milieu de la mode. Il capture les silhouettes enveloppées des créations de Paul Poiret, Madeleine Vionnet, Coco Chanel, Elsa Schiaparelli.
Ses tirages sont publiés dans Vogue, Vanity Fair, Vu mais c’est grâce à Harper Bazaar, célébré actuellement au Musée des Arts Décoratifs (billet d’entrée couplet musée du Luxembourg/MAD à prix réduit), qu’il atteint une renommée internationale dans les années 1930.
Man Ray se fait remarquer par ses expérimentations techniques (solorisations, colorisations), et surtout ses jeux d’ombres et de lumière comme le révèlent ses tirages en noirs et blancs. Il permet ainsi à la photographie de mode de sortir de son carcan académique.
Il en va de même pour ses commandes commerciales. Ses photographies, extrapolées de leur contexte, deviennent par un cadrage resserré, des icônes artistiques. Telles Les Larmes (1933), initialement réalisée pour une marque de mascara.
AU PALAIS GALLIERA
Le Palais Galliera a élargi ses espaces d’exposition en sous-sol, grâce au financement de la maison Chanel. Le parcours sur Gabrielle Chanel (1883-1971) bénéficie ainsi de salles souterraines aux jeux de miroirs époustouflants. Il met en avant son rôle révolutionnaire dans la couture dès 1912 grâce à sa petite robe noire, son tailleur en tweed, son sac à main matelassé et son célèbre parfum n°5 (1921).
La partie supérieure de l’exposition évoque les pièces emblématiques de celle qui débuta à Deauville, puis Biarritz, et Paris. Son style libère le corps des femmes des Années Folles, grâce à des matières souples, voletantes (mousseline de coton et organza de soie), tout en conservant une élégance raffinée. Elle joue du trompe-l’oeil avec des noeuds brodés en guise de ceinture, pour structurer le vêtement.
La princesse Marthe Bibesco écrivait dans un Vogue de 1927 : « C’est dans le détail qu’elle excelle, et laisse éclater sa fantaisie, son imagination, prudemment retenues quand il s’agit du fond, car Gabrielle a le goût trop classique pour se rien permettre qui dérange la pureté de son contour. »
Si la ligne des robes est simple, le luxe s’observe dans les détails et les finitions, avec de nombreux empiècements incrustés, des volants plissés. Ses teintes restent dans une gamme sobre, bleu, noir, beige, avec une petite touche rouge de-ci de-là.
A l’inverse de ses créations de bijoux, exposés au sous-sol : ils sont fantaisistes, imposants en taille, et tout en couleurs !
Après la guerre, G. Chanel doit fermer sa maison de couture. Seule reste ouverte sa boutique du 31 rue de Cambon vendant parfums et accessoires.
Mais la dame n’avait pas dit son dernier mot. Elle revient à la mode en 1954, et affirme son style à contre-courant du New Look de Christian Dior. Loin des tenues corsetées, elle respecte l’anatomie féminine et le confort. D’où son tailleur en tweed dont toute une salle lui est consacré. Elle utilise les lisières du tissu, habituellement cachées dans les coutures, pour les faire apparaître et affirmer son indépendance, son tempérament.
Une femme iconique qui a entretenu sa légende et que l’on redécouvre avec bonheur dans ce beau palais rénové.