Jusqu’au 31 octobre 2010
Musée du Montparnasse, 21 avenue du Maine 75015
Dans le cadre de l’Année France-Russie, le musée du Montparnasse expose la collection privée de Georges Khatsenov qui dévoile le talent d’artistes russes, restés jusqu’à présent en dehors des feux de la rampe. Pourtant, ils représentent une part importante du patrimoine russe qui s’est construite en exil, se nourrissant de la fébrilité créatrice qui régnait alors à Paris, en particulier dans le quartier de Montparnasse. Une richesse culturelle qu’il est temps de redécouvrir.
Des noms, certes moins connus du grand public, que les éminents (peintres) Chagall, Kandinsky, Delaunay, Soutine, Choukhaïeff, (sculpteurs) Zadkine, Orloff, (décorateur) Bilinsky ou encore (illustrateur) Alexeïeff.
Et pourtant, l’ensemble de ces artistes hors frontière regroupés sous le terme de Russkoe Zaroubejie (Russie hors frontière) ont tous participé à l’élaboration de ce patrimoine culturel russe si foisonnant. « Dans la Russie pré-révolutionnaire et révolutionnaire, ils ont illustré les courants divers de l’art de l’époque, de la figuration jusqu’à l’avant-garde suprématiste et constructiviste », précisent les commissaires de l’exposition, André et Vladimir Hofmann.
On oublie souvent que dès 1906, Diaghilev expose à Paris la peinture russe, au salon d’Automne, avant de conquérir le monde avec sa troupe de Ballets. Lorsque ses compatriotes le rejoignent, un peu avant ou après les révolutions de 1917, ils doivent adapter leur style à leur environnement et à une nouvelle existence dont les conditions sont devenues précaires. Ainsi, Marie Vassilieff tempère-t-elle son penchant cubiste par des compositions empreintes de spiritualité. Pougny cherche longtemps sa voie avant de réaliser des petits formats d’inspiration vuillardesque. Annenkov s’éloigne du futurisme pour lui préférer une figuration synthétique qui évoque Dufy. En revanche, l’avant-gardiste Exter reste fidèle à l’abstraction de ses débuts.
Etablis pour la plupart à Montparnasse, les émigrés russes se retrouvent pour confronter leurs idées à La Rontonde, à La Coupole, au Dôme et au Bullier, face à La Closerie des Lilas. « Ils ont marqué les heures chaudes de Vavin et de Port-Royal pendant l’époque d’or de l’entre-deux-guerres », écrivait le critique d’art Pierre Restany.
Les galeries parisiennes commencent à leur ouvrir leurs portes. Telles les galeries Armand Drouant, Bernheim-Jeune, La Boétie, La Renaissance, L’Epoque, Bing, etc. Vladimir Hirshman les reçoit dans son salon du faubourg Saint-Honoré, Lesnik dans son magasin d’antiquités boulevard Raspail et Povolozky dans sa librairie-galerie de la rue Bonaparte.
Cependant, la plupart des émigrés russes achèvent leur existence dans la misère et l’oubli, en dépit de leur apport au patrimoine culturel russe et français. « Il aura fallu attendre la Pérestroïka en Russie pour leur rendre une nouvelle visibilité: ils sont, depuis une quinzaine d’années, redécouverts dans leur pays d’origine, honorés par des expositions personnelles ou thématiques, convoités par les nouveaux collectionneurs. A Moscou existe déja un musée de la ‘Russie hors frontière' », s’enthousiasment les commissaires de l’exposition.