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Le meilleur du Rijksmuseum à Paris

L’âge d’or hollandais – De Rembrandt à Vermeer

Jusqu’au 7 février 2010

[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-L-AGE-D-OR-HOLLANDAIS—REMBR.htm]

Pinacothèque de Paris, 28 place de la Madeleine 75008, 10€

Après l’apogée de la peinture vénitienne au XVIe siècle autour du Titien (musée du Louvre), Paris accueille une rare exposition sur l’âge d’or hollandais, dominé par Rembrandt (Pinacothèque). Les toiles présentées proviennent du Rijksmuseum, actuellement en travaux, et ne sortiront plus du musée d’Amsterdam, une fois celui-ci rouvert. Une occasion unique d’admirer des oeuvres marquées par un réalisme poétique et de brillants jeux de clair-obscur.

La République des Provinces-Unies (futurs Pays-Bas), née en 1581, développe au XVIIe siècle sa puissance commerciale, grâce à sa force maritime, son expansion coloniale et sa tolérance spirituelle. Tandis que le reste de l’Europe s’enfonce dans la récession économique et le conservatisme religieux.

« Les Hollandais eux-mêmes – dont on connaît l’extrême réserve – étaient impressionnés par leurs propres accomplissements. Les protestants de cette nation se percevaient d’ailleurs comme un peuple élu, vivant dans un ‘second Israël' », commente Ruud Priem, commissaire de l’exposition.

Amsterdam, en particulier, attire les meilleurs penseurs, écrivains et artistes.
Forts de leur pouvoir économique, les marchands délaissent la pensée puritaine pour afficher l’ascension de leur statut social. Etoffes luxueuses, maisons magnifiquement meublées, peintures ornant les murs sont les signes de leur enrichissement. Ils deviennent les nouveaux mécènes d’un marché de l’art émergent, au détriment des traditionnels commanditaires – l’aristocratie et l’Eglise. Ruud Priem cite l’historien de l’art John Michael Montias: » les archives prouvent que les peintures sont les objets d’art les plus communs de la République des Provinces-Unies entre 1597 et 1638. Les dessins et la gravure se développent dès 1620″.

Les artistes, réunis en guilde sous le patron saint Luc, rivalisent d’ingéniosité pour traiter les sujets classiques comme la peinture d’histoire. Les paysages et les natures mortes sont renouvelés (cf. précédent article) tandis que la scène de genre fait son apparition. Chacun se spécialise, sauf Rembrandt et Vermeer – deux exceptions à la règle qui symbolisent paradoxalement le XVIIe siècle hollandais.

L’exposition aborde successivement les différents genres picturaux et montre ce que chaque artiste a apporté de meilleur dans son domaine. Willem Claesz Heda, Jan van Huysum et Pieter Claesz excellent dans la nature morte et la vanité. Jan van Goyen, Jacob van Ruysdael, Meindert Hobbema dans le paysage. Willem van de Velde se distingue dans la marine. Frans Hals dans les portraits humains et Paulus Potter dans les dessins animaliers (chevaux essentiellement). Jan Steen, Adrian van Ostade s’intéressent à la satire villageoise, Gerard ter Borch et Pieter de Hooch à la comédie de moeurs.

Une section à part est consacrée à Rembrandt Harmensz van Rijn (1606-1669), maître du clair-obscur. Une technique qui lui vient des artistes d’Utrecht ayant réalisé le voyage initiatique en Italie, où ils découvrent l’oeuvre du Caravage (1571-1610).

Contraints par le Concile de Trente de ne pas représenter d’images saintes, les artistes protestants empruntent également au célèbre peintre italien sa façon d’utiliser des gens du peuple en lieu et dû de personnages religieux. Non seulement ce subterfuge leur permet de contourner l’interdit de l’image sainte, mais il offre au spectateur de l’époque la possibilité de s’identifier aux sujets représentés. Les scènes de genre acquièrent ainsi une valeur faussement réaliste. Nombre de tableaux révèlent de manière subliminale un principe moral, qui entraîne l’émulation dans le public pour le déchiffrer.

Au final, l’exposition donne à voir des paysages lumineux avec des cieux qui s’étendent sur les deux-tiers de la toile. Des étendues de lac gelé sur lequel patine une multitude de personnages traités avec humour et précision, tout comme les scènes d’ateliers et de vie familiale. Des portraits à valeur de scène de genre tant, en particulier Rembrant, l’artiste parvient à décrire dans le visage les émotions du sujet. Des natures mortes aux codes picturaux symboliques (homards, raisins, pétales fanés, vin, pain, insectes, coquillages, etc.).

L’ensemble des oeuvres présentées interpellent le spectateur contemporain tant elles sont riches d’enseignement sur les moeurs de l’époque mais aussi d’un point de vue de l’histoire de l’art – maîtrise du rendu des matières, compositions travaillées, subtils effets de lumière.

Cet âge d’or pictural s’éteint en 1672 lorsque la République des Provinces-Unies entre en guerre contre la France, l’Angleterre et les évêques de Munster et de Cologne. Une déchéance dont ne se sont jamais remis les actuels Pays-Bas.

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