Après la grande rétrospective sur le jazz (musée du quai Branly), voici une petite mais vibrante exposition sur le rock’n’roll. Ou plutôt les rêves qu’il a engendré, tant aux Etats-Unis qu’en Europe. En 1973, Guy Peellaert sortait Rock Dreams (1973). Aujourd’hui, le musée Maillol rend hommage à l’artiste belge en exposant une trentaine de planches originales du livre qui a bénéficié d’un grand retentissement de part et d’autre de l’Atlantique.
Après ses études aux Beaux-Arts de l’Institut Saint-Luc en Belgique, Guy Peellaert (né en 1934 à Bruxelles) renonce à la peinture. Pourtant, il ne perd pas contact avec le domaine artistique. Il réalise des décors de théâtre, des bandes dessinées (Les Aventures de Jodelle, 1966; Pravda la Survireuse dans Hara-Kiri, 1967), des affiches de cinéma (Taxi Driver, Paris Texas, Les Ailes du désir). Et des pochettes de disque pour les Rolling Stones, David Bowie, Etienne Daho, Willy DeVille, etc..
Avec l’écrivan et critique musical anglais, Nick Cohn (né en 1946 à Londres), Guy Peellaert sort Rock Dreams (1973). « Nous voulions faire un livre avec le rock’n’roll comme toile de fond, mais également avec la vie de tout le monde en toile de fond », confiait l’artiste dans une interview de 1977. Le premier écrit le texte, lel second réalise les illustrations.
Illustrations dont une sélection est exposée au deuxième étage du musée Maillol. La technique est surprenante. « A partir d’une photographie, Guy décalque les formes d’un personnage-héros (Tina Turner, Bob Dylan, Jerry Lee Lewis, Ray Charles, les Beatles, Janis Joplin…) », explique Olivier Lorquin, directeur de la Fondation Dina Vierny-musée Maillol. Puis, il les recalque sur une feuille photographique et prend une nouvelle photographie du résultat. Ensuite, il ajoute des couleurs avec un aérographe (pistolet à peinture) et reprend une photographie, qu’il colle sur un carton. Au final, toute trace du travail manuel semble avoir quasiment disparue pour donner l’illusion d’une photographie prise telle quelle, dans les tons mats, afin de rendre une certaine usure du temps. Seule It’s only Rock’n’Roll Recor Cover laisse appararentes les traces du collage.
Pour replacer les chanteurs héros dans un contexte quotidien, Guy Peellaert les insère dans des scènes vernaculaires comme la rue (Ray Davies, Del Shannon, Eddie Cochran), une chambre d’hôtel (Phil Spector), une voiture (Ray Charles conduisant malgré sa cécité), le coiffeur (Chuck Berry), la cuisine (Fats Domino) ou la salle à manger (Bob Dylan) familiales, autour d’une table avec ses buddies mangeant des hamburgers au ketchup (Elvis Presley).
A l’inverse certaines scènes sont empreintes de religiosité (P.J. Proby entouré de femmes nues tels des anges; The Byrds – prophètes nus dans l’eau; Aretha Franklin prêtant sermant sur la Bible).
Quant à l’image de Paul Anka, elle constitue une mise en abîme puisqu’il s’agit d’une histoire racontée sous la forme d’une bande dessinée.
A ces planches empreintes de réalisme couplé de fantaisie artistique s’ajoute une bande son des titres qui firent la gloire des héros représentés. Une exposition détonnante de vitalité, qui rend hommage à Guy Peellaert autant qu’au rock’n’roll.