Frédéric Chopin – La Note bleue
Jusqu’au 11 juillet 2010
Musée de la Vie romantique, 16 rue Chaptal 75009, 7€
Romantisme et Chopin – presque une Lapalissade! Il était donc naturel que le Musée de la Vie romantique célèbre le bicentenaire de la naissance du compositeur polonais Frédéric Chopin (1810-1849) par une exposition inédite: « La Note bleue ». Le titre se réfère à la couleur qu’entendent Delacroix et George Sand dans la musique chopiniste.
Dans une atmosphère historique et poétique, l’exposition évoque les années parisiennes de l’artiste (1831-1849). Chopin se rendait régulièrement à l’Hôtel Scheffer-Renan, en tant que voisin et ami du propriétaire des lieux, le portraitiste d’origine hollandaise Ary Scheffer (1795-1858).
Frédéric (Fryderyk en polonais) François Chopin commencent l’étude du piano auprès de sa mère. A l’âge de six ans, il est confié au violiniste Wojciech Zywny, avec lequel il étudie Bach et Mozart – compositeur romantique par excellence. Le jeune garçon réalise ses premières compositions.
Suite à l’insurrection des Polonais contre les Russes, Frédéric quitte son pays natal. Il arrive à Paris en 1831, et s’installe au 27 boulevard Poissonnière (2e), illustré par l’huile d’Isidore Dagnan (1794-1873). Oeuvre décrite par Jérôme Godeau, co-commissaire de l’exposition, comme influencée par le « moral feeling que la plupart des paysagistes romantiques s’efforcent d’exprimer à la suite de Constable. Le pinceau fluide de Dagnan s’est manifestemment éclairci à la palette des artistes d’Outre-Manche. Mais il emprunte aussi à la tradition des maîtres hollandais pour éclairer l’humble présence du quotidien ».
Chopin rencontre aussitôt Rossini, Pleyel, Liszt, Mendelssohn, etc. Un an plus tard, il donne son premier concert dans les salons Pleyel.
C’est en 1836 que le compositeur rencontre Eugène Delacroix (1798-1863), lors d’un dîner donné par le Franz Liszt (1811-1886). Le début d’une longue amitié. Il est même dit qu’à partir de 1840 le peintre devient le meilleur ami de Chopin.
Cette même année, Frédéric fait la connaissance de George Sand (1804-1876), avec qui il aura une liaison passionnée. En 1846, G. Sand (pseudonyme d’Amantine Aurore Lucile Dupin) publie, sous forme de feuilleton, son roman Lucrezia Floriani, où beaucoup y lisent une transposition de sa relation avec le musicien.
« 1841, Paris. Il [Chopin] est au piano il ne s’aperçoit pas qu’on l’écoute. Il improvise au hasard. Il s’arrête. – Eh bien, eh bien s’écrie Delacroix, ce n’est pas fini! – Ce n’est pas commencé. Rien ne me vient… rien que des reflets, des ombres, des reliefs qui ne veulent pas se fixer. Je cherche la couleur, je ne trouve même pas le dessin. – Vous ne trouverez pas l’un sans l’autre, reprend Delacroix, et vous allez les trouver tous les deux. – Mais si je ne trouve que le clair de lune? – Vous aurez le reflet d’un reflet. – L’idée plaît au divin artiste. Il reprend, sans avoir l’air de recommencer, tant son dessin est vague et comme incertain. Nos yeux se remplissent de teintes douces qui correspondent aux suaves modulations saisies par le sens auditif. Et puis la note bleue résonne et nous voilà dans l’azur de la nuit transparente » écrit George Sand dans Impressions et souvenirs.
Les amants rompront en 1847. Deux ans plus tard, Chopin s’éteint. Ses funérailles ont lieu à l’église de la Madeleine où l’on joue le Requiem de Mozart. Le corps du compositeur est inhumé au cimetière du Père Lachaise, tandis que son coeur, conformément aux voeux de l’artiste, est rapporté en Pologne et scellé dans un pillier de l’église de la Sainte-Croix à Varsovie.
Pour l’exposition, Mme Solange Thierry a offert au musée de la Vie romantique le portrait de la célèbre mezzo-soprano Pauline Viardot, réalisé en 1840 par Ary Scheffer dans son atelier rue Chaptal. Dans cette oeuvre, « les traits qu’on a dit ingrats sont ici magnifiés; l’ovale du visage, l’élégance du cou qu’accentue le jeu du clair-obscur mettent en valeur le charme du modèle et la bonté légendaire de la cantatrice », commente la co-commissaire Solange Thierry.
Bien sûr trône en bonne et due place le portrait de Chopin réalisé par E. Delacroix (musée du Louvre), qui ne fut jamais terminé. Il demeura dans l’atelier du peintre, qui le légua à son confrère et ami Constant Dutilleux.
Autre oeuvre clé: Ville d’Avray, l’étang au bouleau devant les villas (1873) de Camille Corot (1796-1875). Pour J. Godeau, cette huile évoque les « giboulées lumineuses des arpèges », les « sinuosités chromatiques » de Chopin, elles-mêmes dépeintes par Liszt « comme les goutelettes d’une rose diaprée, par-dessus la figure mélodique ».
Une exposition qui fait entrer en résonnance musique, poésie et peinture. Elle met en valeur l’apport des artistes romantiques qui ont su imposer, grâce à leur sensibilité extrême et l’expression de la profondeur de leur émotions intimes, la musique comme un art à part entière.