Jusqu’au 27 juillet 2014
Fondation Henri Cartier-Bresson, 2 impasse Lebouis, Paris XIV
C’est un homme à la sensibilité à fleur de peau. Comme je n’en ai jamais vu. Parler de son oeuvre lui arrache presque des larmes. Emmet Gowin expose à la Fondation Henri Cartier-Bresson ses photographies, miroir de sa vie intime et de sa passion pour la nature.
« Pour moi, les photographies sont un moyen de retenir, intensément, un moment de communication entre un être et un autre », explique l’artiste américain Emmet Gowin (né en 1941 en Virginie).
Tout tourne autour de sa femme, Edith, qu’il rencontre dans un bal en 1960 et qu’il épouse quatre ans plus tard. « Sans elle, vous n’auriez jamais entendu parler de moi », ironise le photographe. Sur les 130 tirages, au moins la moitié capture Edith, seule, puis avec leurs deux garçons.
« Je ne crois pas pouvoir faire des photographies de façon impersonnelle car je me sens concerné et impliqué dans les situations qui m’amènent à faire une photographie ou qui transcendent cet acte ».
L’exposition présente la seconde passion d’E. Gowin : la nature. En particulier les paysages marquées par l’homme. Il voyage en Europe (Irlande, Italie), en Jordanie suite à l’invitation de la reine Nor pour photographier le site archéologique de Pétra.
Puis il se lance dans la photographie aérienne et capture les paysages dévastés par les catastrophes naturelles (éruption du Mont St. Helens, Washington) ou dénaturés par l’action humaine (mines de charbon à ciel ouvert en Tchécoslovaquie, exploitations agricoles intensives dans le Colorado ou l’Utah, paysages lunaires des sites d’essais nucléaires de Hanford).
« Ces images ne sont pas un appel à l’action, mais un appel à la réflexion, à la méditation et à l’attention pour avoir un rapport plus intime avec le monde ».
L’exposition se conclut sur ses dernières oeuvres présentant une nouvelle fois sa femme, ou plutôt son ombre, se décalquant sur un assemblage de papillons de nuit. L’artiste a travaillé avec des biologistes pour recenser des milliers d’espèces vivant dans la forêt tropicale d’Amérique du Sud. Il utilise à cet effet un procédé de tirage unique sur du papier fait main et dont les épreuves sont virées à l’or.
La seconde partie m’a plus captivée que la première. Que ce soit les photos de Matera, les paysages défoncés par les essais nucléaires ou encore la série sur les papillons de nuit, les photographies sont à la fois techniques (richesse et précision des détails) et artistiques. En revanche, s’il est touchant de voir l’amour du photographe pour sa femme, sa vie de famille prise sous toutes les coutures – jusqu’à voir Edith uriner debout -, n’a pas toujours de quoi susciter l’intérêt du public.