Photographe, muse, peintre
Jusqu’au 29 juillet 2019
Centre Pompidou, Niveau 6, Galerie 2, Paris 4e
Le Centre Pompidou dévoile les multiples facettes de Dora Maar (1907-1997), trop souvent réduite au rôle de muse de Picasso. Elle-même artiste, elle a développé une carrière de photographe et de peintre, oubliée depuis les années 1950. Une oeuvre à (re)découvrir !
De Dora Maar (née en 1907 à Paris), on se souvient surtout des portraits colorés qu’en a fait Picasso autour des années 1940. Le parcours nous fait prendre conscience d’une personnalité plus complexe, à commencer par son « vrai » visage, à partir d’une photographie de Rogi André (vers 1937).
Dora Maar se forme à l’Ecole technique de photographie et de cinématographie de la Ville de Paris. Elle ouvre son studio en 1932 avec le décorateur de cinéma Pierre Kéfer, à Neuilly-sur-Seine. Ils réalisent des portraits, des photographies de mode et des publicités d’une extrême modernité. D. Maar réalise seule la plupart des commandes, bien qu’ils signent « Kéfer-Dora Maar », jusqu’en 1935. Elle ouvre alors son propre studio au 29, rue d’Astorg (Paris 8e).
Une adresse devenue mythique, où – la première – elle photographiera Picasso. Et qui donnera son titre à une image tout aussi iconique, représentant un personnage féminin à la tête animalière (mi-tortue mi-autruche, j’hésite !), assis sur un banc en légère lévitation, dans la galerie de l’Orangerie du Château de Versailles (1935).
Maar et Picasso se rencontrent au cours de l’hiver 1935/36, alors que Picasso travaille sur Guernica. Dora documente le processus de création du mural qui aboutit au printemps 1937. Ils resteront près de huit ans ensemble.
Politiquement, Maar s’engage à l’extrême gauche comme beaucoup d’intellectuels de son temps. Elle se rapproche des surréalistes, dont André Breton et le couple Eluard, participant à leurs actions politiques et manifestations artistiques.
Le visiteur découvre ensuite ses peintures, médium qu’elle pratique suite à sa rencontre avec Picasso. Natures mortes au cadrage très serré, tel un gros plan photographique sur un vase, un verre, une lampe – seulement deux ou trois objets sont représentés. Dora Maar pratique la peinture jusqu’à la fin de sa vie mais cesse de montrer son travail à partir des années 1950. D’où son oubli dans la mémoire collective.
Ce qui m’a le plus interpellé dans son oeuvre sont ses photographies de la « magie urbaine » – ses rencontres accidentelles avec l’ironie du quotidien – et ses encres sur papier. L’exposition offre un nouveau regard sur cette Parisienne à la pointe de l’avant-garde, qui a su dépasser son rôle de muse, et affirmer son indépendance artistique. Une féministe avant l’heure !