Jusqu’au 31 mai 2009
[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-RETROSPECTIVE-DAVID-LACHAPELLE-DAVLA.htm]
Monnaie de Paris, 11, quai de Conti 75006, 10€
Il n’aurait pas mieux pu porter son nom. Le célébrissime photographe américain, David LaChapelle (né en 1963, à Fairfield, Connecticut), bénéficie d’une rétrospective à La Monnaie de Paris, dont les voûtes rappellent la Chapelle Sixtine. Or, l’une des récentes oeuvres du photographe interprète Le Déluge (1508/9), peinte par Michel-Ange (1475-1564) pour la chapelle du Vatican… C’est que D. LaChapelle voue au plus connu des artistes de la Renaissance une adoration sans limite.
Cette première rétrospective parisienne expose naturellement les plus connues des oeuvres de David LaChapelle – celles des stars: Naomi Campbell, Madonna, Amanda Lepore, Pamela Anderson, Paris Hilton qui lui doit sa renommée médiatique, Cameron Diaz, etc..
Grand photographe de mode et publicitaire, David LaChapelle s’est fait connaître par des mises en scènes démentes, très soignées, sans recours au numérique, qui illustrent autant qu’elles dénoncent le star system, le culte de la personnalité. Tout en faisant ressortir le côté glam et la beauté des modèles, qu’ils soient blanc, noir, petit, grand, mince, obèse, jeune, âgé.
Au début de sa carrière, David a frayé avec l’underground. C’est dans ce milieu alternatif new yorkais qu’il rencontre le roi du Pop Art, Andy Warhol. Celui-ci, rédacteur en chef du magazine branché Interview, accepte de publier les photos de nus de D. LaChapelle. Il a tout juste 19 ans.
L’influence de Warhol dans l’art de son élève se retrouve dans son choix de couleurs saturées, artificielles, pour dénoncer le superflu, l’illusion engendrés par le consumérisme. En particulier aux Etats-Unis dont les excès du capitalisme se concentrent dans des villes comme Las Vegas et Los Angeles, où vit actuellement l’artiste. David LaChapelle est également un artiste pop par sa volonté de transmettre son message au plus grand public possible.
Il devient lui-même si connu qu’en 1996 il est consacré meilleur photographe de l’année par les magazines Photo (français) et American Photo.
Arrivé à ce point de non retour, croulant sous la pression, l’artiste souhaite prendre du recul par rapport à son oeuvre. Effrayé par les événements mondiaux – guerres religieuses (cf. Holy War), ouragans dévastateurs (cf. The House of End of the World, 2005) -, diffusés en boucle sur CNN , David LaChapelle se réoriente vers une production plus artistique que publicitaire (il a signé les campagnes de pub des plus grandes enseignes commerciales et musicales de la planète).
L’occasion d’exposer son travail dans les musées européens (au Barbican, Londres, 2000; à la Monnaie de Paris, 2009). La série Awakened (2007), qui représente un individu capturé sous l’eau, « dans une sorte de temple individuel, en train d’accéder au Paradis », commente Gianni Mercurio, commissaire de l’exposition, atteste de cette libération des commanditaires commerciaux et traduit la quête spirituelle de l’artiste.
Pour la Monnaie de Paris, David LaChapelle présente en avant-première la série Auguries of Innocence (Présages d’Innocence, titre d’un poème de William Blake). L’artiste transcende le medium photographique pour lui faire atteindre la troisième dimension. Tel un livre pour enfant, avec des images en carton – matériau humble par excellence – dessinées en relief. Ainsi, The Crash (empilement de morceaux de voitures accidentées) dénonce la course aux grosses voitures qui paradent à Los Angeles, explique l’artiste. « Le relief est une manière amusante et directe – il n’y a pas besoin de légende écrite – pour communiquer avec le public ». Car, pour lui, l’art contemporain de qualité est celui qui parvient à atteindre le spectateur, par une simple communication visuelle, sans narration explicative écrite.
David LaChapelle ne se contente pas de transmettre un message au public en dénonçant le monde dans lequel nous vivons. « Loin d’être un simple miroir de la société, mon oeuvre apporte du sens, des éléments de réponse à la décadence de notre univers ». Pour lui, qui s’est fait tatouer le mot lust (désir, luxure) sur les doigts de la main droite, la rédemption de l’homme ne peut se réaliser que par la spiritualité. « L’illumination arrivera, c’est un artiste qui nous l’offrira, et non pas CNN », affirme-il.
Cathartiques, ses oeuvres expriment les craintes d’une humanité blasée, écrasée par le poids de son matérialisme. Elles nous invitent à participer au processus collectif et à l’expérience intellectuelle qui découle du processus photographique.
Ne pas manquer les deux making-off (dont l’un, Pieta with Courtney Love, 2006, sur fond d’Alleluia de Jeff Buckley) qui permettent de décrypter la mise en scène des photographies et de prendre le poul de la démesure créative et poétique (cf. Collapse in a Garden, 1995) de l’artiste.