Corps et âmes

Jusqu’au 25 août 2025

Bourse de Commerce, 2 rue de Viarmes, Paris 1er

Alors que les années 50 se détournent de la représentation du corps, le collectionneur F. Pinault continue de s’y intéresser et rassemble un corpus significatif que nous dévoile la nouvelle exposition de la Bourse de Commerce.


Irving Penn, Hand of Miles Davis (C), New York, 1986. Tirage argentique. Pinault Collection © The Irving Penn Foundation

L’exposition « Corps et âmes » présente près de quarante artistes, dans une chorégraphie orchestrée avec brio par Emma Lavigne (directrice générale de la Pinault Collection).

Les oeuvres interrogent la thématique du cycle de la vie, autour de deux axes : le corps témoin et le corps exposé.

« L’ouverture de cette exposition résonne d’autant plus fort avec la grave actualité que nous vivons », commente Guillaume Cerutti, nouveau président de la Pinault Collection (ex Christie’s monde).


Gideon Appah, The Confidant, 2021. Huile, acrylique sur toile, diptyque. Pinault Collection © Gideon Appah. Courtesy de l’artiste et Venus Over Manhattan. Photo: Venus Over Manhattan, New York.

Nombre d’oeuvres explore la représentation du corps noir dans l’histoire de l’art. Dans le Salon, le diptyque du peintre ghanéen Gideon Appah emprunte les couleurs fauves de la modernité pour représenter des personnages noirs dans une tentative de fusion avec la nature.

À l’étage, Duane Hanson présente deux sculptures hyper-réalistes : un autoportrait et un peintre en bâtiment. Malgré leur différence de statut, ces deux hommes sont reliés par un regard vide face à l’état du monde. Peut-on encore peindre la vie en rose ?


Lynette Yiadom‐Boakye, Light of The Lit Wick, 2017. Huile sur lin. Pinault Collection © Lynette Yiadom‐Boakye

Plus loin, Lynette Yiadom-Boakye représente des corps noirs sortis de son imagination sur des fonds vides, dans une tension palpable entre créativité et réalisme.


Kerry James Marshall, Beauty Examined, 1993. Acrylique et collage sur toile. Pinault Collection © Kerry James Marshall

Une grande toile de Kerry James Marshall (Beauty Examined, 1993) réinterprète La Leçon d’anatomie du professeur Tulp (1632) de Rembrandt et la destinée de Saartjie Baartman (dite la « Vénus Hottentote »), Sud-Africaine au corps atypique, esclave sexuelle exhibée par les colons, dont le corps a été disséqué et autopsié par Georges Cuvier. L’artiste interroge ici la représentation du corps féminin et son exhibition dans l’histoire de l’art.

Ce corps féminin déchiré trouve écho dans celui de la jeune femme de Mira Schor (It didn’t happen, 2024), au ventre scindé en deux, sanguinolent.

L’artiste zimbabwéenne Kudzanai-Violet Hwami fragmente des autoportraits pour interroger l’unicité de l’identité et l’objectivation des corps féminins noirs et queers (Atom Paintings, 2021).


Michael Armitage, Dandora (Xala, Musicians), 2022. Huile sur tissu d’écorce de Lugudo. Pinault Collection © Michael Armitage. Photo: White Cube (David Westwood)

Le peintre kenyan Michael Armitage représente dans Dandora (2022) un paysage où nature et détritus, musiciens traditionnels, chiffonniers et bétails, se côtoient librement, sur une toile de lubugo, obtenue à partir d’écorce de figuier, utilisée traditionnellement pour les rites funéraires. Nairobi constitue la plus grande décharge à ciel ouvert où vit près d’un million d’habitants. Contemporanéité et traditions se mêlent pour rendre compte d’une réalité que les Occidentaux préfèrent ne pas voir.


Georg Baselitz, Was ist gewesen, vorbei, 2014. Huile sur toile, 8 éléments. Pinault Collection © Georg Baselitz.

La série Avignon de Georg Baselitz (2014) composée de huit toiles représentant le corps vieillissant de l’artiste la tête en bas fait écho à la danse des corps que l’on retrouve dans la vidéo d’Arthur Jafa, diffusée dans la Rotonde, Love is the Message, the Message is Death (2016), qui incarne selon l’artiste l’affirmation de l’identité africaine-américaine.

Une exposition où les corps apparaissent et disparaissent au gré des courants artistiques, jusqu’à laisser entrevoir l’âme d’une société, souvent violente, mais non dénuée de poésie, d’amour et d’espoir.

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