Voyage virtuel de Palmyre à Mossoul
Jusqu’au 10 février 2019
Achetez le catalogue de l’exposition :
Institut du Monde Arabe, 1 rue des Fossés Saint-Bernard, Paris 5e
L’Institut du Monde Arabe propose une exposition inédite : aucune oeuvre n’est présentée, il y a juste des projections… mais quelles images ! Celles de sites antiques au Moyen-Orient menacés ou déjà détruits. De Palmyre à Mossoul, un voyage bouleversant, entre passé, présent et futur.
Palmyre, Alep, Mossoul, Leptis Magna. Quatre cités millénaires (habitées par les Perses, Grecs, Romains, Arabes) médiatisées lors de la destruction de leurs monuments historiques par les djihadistes. « Aux destructions, nous répondons par des renaissances numériques », commente Aurélie Clemente-Ruiz, (directrice des expositions de l’IMA), commissaire de l’exposition. « Face aux destructions massives infligées ces dernières années au patrimoine arabe, il était important que l’IMA fasse entendre sa voix », ajoute Jack Lang (président de l’IMA).
Le parcours débute par une grande carte qui permet de situer les quatre villes – deux syriennes, une irakienne et une libyenne -, présentées virtuellement dans l’exposition.
Un grand écran projette une vue de Mossoul, reprise depuis peu à l’Etat Islamique. La ville a subi des destructions de bâtiments massives, dont la mosquée al-Nouri avec son célèbre minaret – le plus haut d’Irak (60 mètres de haut) et incliné de 3 mètres. Cet édifice, construit par le souverain Nür al-Dîn entre 1170 et 1172, a été détruit le 21 juin 2017 par l’EI. Il n’en reste aujourd’hui qu’un dôme vert, affaissé sur une structure en ruine. Une seconde projection vient alors se superposer à ces images désolantes pour visualiser sa reconstruction. Qui devrait être effectuée dans les années à venir, suite à un accord signé en avril 2018 entre l’UNESCO (partenaire de l’exposition), les Emirats arabes unis et l’Irak, pour un coût de 50,4 millions de dollars.
Une table circulaire centrale donne des informations sur les vues que l’on aperçoit dans la grande projection.
Sur le côté, une autre projection donne à voir l’architecture de la ville à différentes dates du XXe siècle, reprenant vie grâce aux photographies d’archives animées.
Enfin, une petite salle, qui évoque l’intérieur d’une maison arabe, donne des informations historiques sur la naissance de Mossoul, ville multi-confessionnelles. L’église Notre-Dame de l’Heure et un temple yézidi y sont présentés.
Avant de passer à la ville suivante, où la même scénographie se répètera, un sas de transition livre des citations d’écrivains et de voyageurs sur Mossoul et Alep, second lieu abordé dans l’exposition.
Alep est moins endommagée que Mossoul mais dans la ville ancienne, les destructions atteignent entre 20 et 40% du tissu urbain. En outre, la grande mosquée des Omeyyades a été entièrement détruite. Une projection virtuelle permet de lui redonner vie. Des petites vidéos très bien faites donnent la parole aux citadins, aux souvenirs de leur ville quand ils ont émigré, ou à leur résistance quand ils y vivent encore.
La troisième ville, Leptis Magna (Libye), n’a subi aucune destruction malgré la guerre civile (2011-2018). Certainement parce que la population commence tout juste à prendre conscience du riche patrimoine de sa ville et de la nécessité de le préserver. Cette indifférence a permis de ne pas attirer l’attention sur les monuments romains encore exceptionnellement préservés (temples, basiliques, forum, théâtre, amphithéâtre, thermes, etc.). En revanche, la ville – surnommée par les Romains eux-mêmes « la Rome d’Afrique » – est aujourd’hui menacé par les pillages, l’abandon, et l’avancée de la mer.
Palmyre, elle, ne compte plus les ravages que les Islamistes lui ont fait subir. Les édifices symboliques comme le temple de Bel et celui de Baalshamîn, ont été violemment détruits. Seules les tombes souterraines, comme celle dite « des Trois frères », ont été préservées car elles fournissaient un bon abri aux fondamentalistes. Ils ont quand même recouverts les peintures à la chaux car, iconoclastes par idéologie, ils ne pouvaient souffrir la vue des visages saints représentés, et caché les sculptures de couvertures.
La dernière salle offre une expérience immersive, mise en scène par le leader de jeux vidéo Ubisoft. Le visiteur dépose un casque sur sa tête et ses yeux et observe six sites à travers les lunettes qui donnent l’impression d’y être physiquement. On découvre ainsi par tranches de trente secondes : le temple de Baalshmîn (Palmyre, Syrie), le souk d’Alep (Syrie), les souterrains de Nabi Younes (Mossoul, Irak), l’église Notre-Dame de l’Heure (Mossoul), la mosquée al-Nouri (Mossoul), la basilique de Leptis Magna (Libye). Le casque relié à un fil suspendu permet au visiteur de se déplacer dans un périmètre de 9m2 pour mieux apprécier la vue.
Une expérience à la fois bouleversante et bluffante. L’exposition se veut un manifeste pour la défense de ce patrimoine légendaire, d’identité à la fois arabe et universel. A voir absolument !