Science-fiction et nouveaux magazines
Jusqu’au 27 octobre 2024
Institut du monde arabe, 1 rue des Fossés-Saint-Bernard, Paris 5e
L’IMA présente les oeuvres de dix-huit artistes du monde arabe et de ses diasporas sur le thème des « Voyage(s) vers demain » (titre de la pièce de théâtre de Twfik-al-Hakim, 1957). Science-fiction et nouveaux imaginaires sont au coeur de cette création contemporaine originale.
Le parcours de l’exposition s’apparente à un vaisseau, qui part de la réalité terrestre pour atteindre un futur alternatif.
Les premières oeuvres incarnent le concept pensé par Sophia Al-Maria et Fatima Al Qadiri de « futurisme du Golfe » (2012), soit l’ambition technologique de cet espace géographique. Dans Black Friday (2016), l’Américo-Qatarie Sophia Al-Maria questionne l’ultra-capitalisme incarné par le centre commercial. Ce lieu d’hyper consumérisme est présenté comme une sorte de tombeau, qui met en avant le lavage de cerveau que sa déambulation entraîne, la superficialité de l’expérience consumériste, et la facticité de sa construction en plein désert.
La confrontation entre espaces naturels et bâtis se reflète dans l’oeuvre de Zahrah Al Ghamdi, Birth of Place (2011). L’artiste saoudienne s’inspire de l’architecture du site al Turaif, classé au patrimoine de l’Unesco, pour construire une installation en bois, coton et barbotine ; vision d’un espace urbain futuriste, dont les pics de matières naturelles évoquent la skyline de gratte-ciels.
La science-fiction ne va pas sans l’iconographie d’un monde intergalactique. L’artiste franco-marocain Mounir Ayache a imaginé un jeu vidéo à partir de la biographie du géographe et ambassadeur maghrébin Hassan al-Wazzan (v.1494-v.1555), devenu Jean-Léon l’Africain sous le pape Léon X. Un joystick permet de déplacer son avatar, à la tenue d’acier ciselée, dans un monde où réel et virtuel se mêlent et où les temporalités (passé-présent-futur) fusionnent. L’iconographie s’inspire à la fois de l’univers artistique occidental et islamique.
Devant l’urgence climatique, les artistes rêvent d’un monde organique, où le vivant et le non-vivant cohabitent. Des organismes mutants et poétiques prennent vie comme le Mycellum de Zahrah Al Ghamdl. Au premier abord, on a l’impression de voir des champignons fleurirent sur les pans du mur. En réalité, il s’agit de morceaux de cuir que l’artiste saoudienne a découpés, cousus, rembourrés, bouillis et brûlés ! Entre matière organique et architectonique, cette installation évoque l’artisanat traditionnel du sud-ouest de la péninsule arabique. Ces champignons du futur semblent recoloniser des espaces naturels détruits par l’homme.
Des oeuvres surprenantes, mi-oniriques mi-inquiétantes, qui questionnent avec pertinence notre monde en devenir.