Jusqu’au 18 juillet 2016
[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-AMADEO-DE-SOUZA-CARDOSO-AMAVG.htm]
DVD de l’exposition :
Galeries nationales du Grand Palais, entrée square Jean Perrin, Paris 8e
Tombé dans l’oubli, Amadeo de Souza-Cardoso (1887-1918) bénéficie aujourd’hui d’une rétrospective au Grand Palais. Un siècle après sa première exposition à l’occasion du Xe Salon d’Automne.
Installé un temps à Paris (1906-1914), l’artiste portugais repart à Manhufe (Nord du Portgual) au début de la Grande Guerre. En succombant à 30 ans de la grippe espagnole, il ne reste célèbre que dans son pays natal.
Et pourtant…
Après avoir exposé Avant la Corrida au Salon d’Automne de 1912 puis à l’Armory Show (New York) de 1913, vendue immédiatement, l’artiste envoie d’autres oeuvres aux Etats-Unis qui connaissent toutes le succès. Elles sont aujourd’hui conservées principalement à l’Art Institute of Chicago.
A suivre de près la chronologie des révolutions esthétiques du XXe siècle, il semblerait, selon Helena de Freitas (historienne de l’art, Fondation Calouste Gulbenkian, Lisbonne), commissaire de l’exposition, que Souza-Cardoso ait devancé Amedeo Modigliani et Constantin Brancusi, avec lesquels il était ami, dans leur quête de formes novatrices.
Difficile d’imaginer dès lors que l’artiste soit à ce point tombé dans l’oubli. A tel point que Robert Loescher (historien d’art) le qualifie de » l’un des secrets les mieux gardés du début de l’ère moderne » (2000).
Fils d’une famille traditionnelle de la riche bourgeoisie rurale, Amadeo part à Paris dans l’intention de passer l’examen d’entrée de l’Ecole des beaux-arts, section architecture. Ayant suivi auparavant le cours préparatoire de Dessin de l’Académie Royale des Beaux-Arts de Lisbonne, il s’essaie à la caricature et publie ses dessins dans les périodiques portugais.
En 1907, il abandonne l’idée d’étudier l’architecture et s’intéresse à la peinture. En 1909, il s’installe dans le studio attenant à celui de Gertrude et Leo Stein, au n°27 rue de Fleurus (Paris 6e). Il rencontre A. Modigliani puis C. Brancusi et le sculpteur ukrainien A. Archipenko.
Amadeo rencontre le couple Delaunay et fréquente de plus en plus le milieu d’avant-garde : D. Rivera, B. Cendrars, G. Apollinaire, M. Laurencin, A. Gleizes, F. Picabia, M. Chagall, U. Boccioni, P. Klee, A. Macke, etc.
Souza-Cardoso participe au XXVIIe Salon des Indépendants, considéré a posteriori comme la première grande exposition cubiste.
En 1912, il prépare la publication de l’album XX Dessins – à l’encre de Chine, reflétant un monde mêlant références mauresques et utopiques, des formes qui auraient inspirées Princesse X de Brancusi. Il se lie d’amitié avec le sculpteur O. Freundlich.
En couple avec Lucie Meynardi Pecetto, rencontrée à la Crèmerie Chaude (Montparnasse) en 1908, il s’installe un temps dans ce qu’il nomme la « noble Bretagne », à Pont-l’Abbé. Il commence à illustrer La Légende de saint Julien L’Hospitalier de G. Flaubert.
En 1913, Souza-Cardoso participe à l’exposition organisée par la galerie Miethke à Vienne, aux côtés de Kokoschka, Picasso, Braque et Léger. Il expose également à New York, Chicago, Boston, Berlin (au premier Salon d’Automne allemand : Erster Deutscher Herbstsalon).
De retour au Portugal pour épouser Lucie (1914), Amadeo ne peut revenir à Paris en raison de la guerre. Il partage son temps entre la peinture, la chasse et les promenades à cheval dans les montagnes environnantes dont il admire « l’échine qui attire les caresses ».
Avec ses compatriotes Almada Negreiros, José Pacheco et Eduardo Viana, le russe Baranoff-Rossiné et plus tard Apollinaire et Cendrars, Amadeo organise des expositions itinérantes (« expositions mouvantes ») qui reflètent sa passion pour le changement et la vitesse. Un rêve qu’il ne réalisera pas : exposer dans un avion qui ferait l’aller-retour entre Paris et New York.
Tout en continuant de planifier son retour à Paris, l’artiste se réfugie dans la propriété familiale d’Espinho, pour échapper à la grippe espagnole qui fera en 1918 vingt millions de morts. En vain.
Si l’artiste a la bougeotte, n’étant jamais satisfait de l’endroit où il réside et rêvant toujours d’être ailleurs, il transcrit principalement dans ses oeuvres l’univers de Manhufe. Paysage naturel mais aussi mental. Il y intègre des thèmes traditionnels : objets du quotidien, paroles de chansons populaires, poupées folkloriques, instruments de musique régionaux, châteaux imaginaires, forêts, intérieurs familiers.
Ces éléments fusionnent en s’appropriant les innovations du cubisme, futurisme et de l’expressionnisme. L’artiste confronte des fragments du monde rural et de la vie urbaine dans une dynamique où explosent les couleurs et ondulent les formes. Présentée dans le cadre du printemps culturel portugais à Paris, cette exposition permet de découvrir un artiste au style à l’image de sa vie : singulier et intense.