Revoir Cimabue

Aux origines de la peinture italienne

Jusqu’au 12 mai 2025

Musée du Louvre, Paris 1er

La restauration de la Maestà et celle de La Dérision du Christ (oeuvre acquise en 2023) de Cenni di Pepo dit Cimabue (1240-1301/02) sont l’occasion pour le musée du Louvre de revenir sur ce peintre italien à la vie quasi-inconnue mais dont l’oeuvre pose la pierre angulaire de la peinture occidentale.

Peintre byzantin, Madone Kahn, vers 1272-1282. Tempera et or sur
bois, peuplier (panneau), sapin (cadre). Courtesy Washington, National Gallery of Art

Ce peintre, dont seule une quarantaine d’oeuvres nous sont parvenues, cherche à représenter pour la première fois le monde tel qu’il le voit. Et non selon les critères des icônes byzantines considérées comme des images aicheiropoïètes, c’est à dire « non faites de la main d’homme », et dans lesquelles les personnages sacrés ne doivent pas ressembler aux humains.

Giunta di Capitino, dit Giunta Pisano (Pise, documenté de 1229 à 1265 (?)), Croix peinte, dite de San Ranierino, vers 1240-1250. Tempera et huile sur bois. Pise, Museo nazionale di San Matteo.

Leurs déformations anatomiques codifiées sont visibles sur la Croix de San Ranierino de Giunta Pisano – figure artistique dominante de l’époque – ou dans la Madone Kahn (réalisée par un peintre byzantin inconnu).

Cenni di Pepo, dit Cimabue (Florence, vers 1240 – Pise, 1302), La Vierge et l’Enfant en majesté entourés de six anges (Maestà), 1280-1290. Tempera sur fond d’or sur bois (peuplier). Musée du Louvre © C2RMF / Thomas Clot

Au coeur de l’exposition s’élève la Maestà de Cimabue qui rompt donc avec les conventions des icônes orientales. Le peintre cherche à prêter des traits plus enfantins à Jésus, bien qu’il conserve des cernes d’adulte ! Cependant, l’influence orientale demeure dans le tissu qui recouvre le trône et la bordure rouge couverte de fausses inscriptions islamiques. Une carte permet de comprendre le contexte géo-politique de l’époque avec un royaume italien au coeur des échanges commerciaux avec la Méditerranée et l’Orient. La restauration de l’oeuvre, dégagée de ses multiples couches de vernis, permet de révéler l’éclat de la tunique de Marie, composée de lapis-lazuli – pigment byzantin par excellence.


Duccio di Buoninsegna (Sienne, documenté à partir de 1278 – 1318), La Vierge et l’Enfant avec trois franciscains, dite Madone des Franciscains, vers 1285-1288. Tempera sur bois. Sienne, Pinacoteca nazionale

La monumentalité de cette oeuvre laisse supposer que Cimabue disposait d’un atelier, dont l’un des élèves serait Giotto. « Cimabue aurait également influencé le peintre siennois Duccio di Buoninsegna comme on peut le voir dans la Madone de Crevole par rapport au modelé du visage de la Vierge et les jeux de transparence qui se rapprochent de la Maestà », commente Thomas Bohl (conservateur au département des Peintures, musée du Louvre), commissaire de l’exposition.

Comme dans Revoir Watteau (visible jusqu’au 3 février 2025), ce genre de petite exposition dossier se révèle passionnante, avec en sus des prêts exceptionnels (oeuvres considérées comme Trésor national, rarement sorties de leurs pays). À découvrir !

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