L’Âge de la céramique
Jusqu’au 6 février 2022
#LesFlammes
Musée d’art moderne de Paris, 11 avenue du Président Wilson, Paris 16e
Pour la première fois un musée parisien consacre une exposition à la céramique, d’habitude reléguée aux arts décoratifs. Un parcours avec des splendeurs et des laideurs ! « Les Flammes – L’Âge de la céramique », c’est à voir au musée d’art moderne de Paris (MAM).
L’installation in situ de l’Anglaise Clare Twomey (née en 1968, vit à Londres), Monument (2021), sert de préambule. Elle rassemble des rebuts de plusieurs manufactures françaises de porcelaine pour aborder les questions contemporaines de surproduction, surconsommation, et recyclage. Elle interroge également la place de la céramique entre objet fonctionnel et sculpture artistique.
Les premières salles sont passionnantes, avec une explication des différents matériaux, techniques et décors possibles, mêlant pièces du néolithique à celles de nos jours. On admire ainsi dans une vitrine une statuette au corps féminin (rare en France !) datant du Chasséen (4350 à 3300 av. J.-C.), L’Ariane endormie en terre cuite (vers 1940) de G. de Chirico et un vase globulaire avec tête en terre cuite peinte provenant du site de Pachacamac au Pérou (600-1000 ap. J.-C.). Plus loin, un tableau de Natsuko Uchino (née en 1983 au Japon, vit en France), Adobe (2019), à base de terre crue, argile, sable et paille fait face à une jarre lune en porcelaine blanche mate (17e-18e siècle) de Corée (anonyme). Des objets que vous pouvez voir sur le compte twitter d’Artscape…
Un extrait des Contes de la lune, vague après la pluie (1953) de Kenji Mizoguchi dans lequel un paysan complète son activité par la vente de belles pièces de céramique qui attirent le regard d’une noble propose un interlude face aux fours anthropomorphes de Roberto Cuoghi (né en 1973, vit à Milan), construits sur l’île d’Hydra (Grèce) à l’occasion de son exposition Putiferio.
La salle suivante aborde les motifs avec un bol de Jean Girel, dans lequel on noie son regard. Ce qui rend la tasse avec la reproduction du mariage du Prince William & Kate (2011) bien kitsch !
La suite propose des oeuvres d’une grande diversité visuelle. Parmi les pépites se trouve Morgane Captive (2012) de Ron Nagle, artiste musicien, peintre et sculpteur de Californie. Il joue avec les contrastes de couleurs et de matières dans des pièces de petit format au rendu extraterrestre.
Un vase à fleurs de la manufacture de Kameyama (vers 1840) en grès avec un décor de pin – symbole japonais de longévité – illustre l’art de l’ikebana (l’arrangement des fleurs selon les saisons) qui joue sur l’asymétrie, l’espace et la profondeur à partir d’éléments incarnant le ciel, la terre et l’humain.
Non loin, un panneau composé de 66 carreaux de faïence émaillée de William Frend De Morgan (1839-1917) et William Morris (1834-1896) illustre le mouvement britannique Arts & Crafts, à l’origine du design moderne.
Autre « tableau » sculptural qui a retenu mon attention : Nature morte virtuelle #17 (1995) de Roger Brown (1941-1997) rassemble des tasses avec anses sur une planchette devant un paysages désertique strié de bandes lumineuses, et perdues en haut deux petites silhouettes stylisées.
Petit trésor en fin de parcours : un bijou en céramique datant du 2e millénaire avant J.C. provenant de Dallaya et extrait de l’Iraq Museum actuellement en très mauvais état.
Et pour finir, une théière en grès composée de cubes dont l’un représente un crâne (1992) de Richard Notkin (né en 1948, vit dans le Montana) ; une oeuvre politique qui dénonce les guerres, celle du Vietnam notamment.
Très hétéroclite, l’exposition a le mérite d’aborder un sujet riche et peu connu car la céramique est très technique et brouille les frontières entre art et artisanat.