Artiste & designer
Jusqu’au 24 janvier 2022
Musée Jacquemart-André, 158 boulevard Haussmann, Paris 8e
Quelque peu tombé dans l’oubli après sa mort, Sandro Botticelli (vers 1445-1510) a été redécouvert au 19e siècle et a bénéficié depuis d’une renommée à la hauteur de celle de son vivant. Il était alors considéré comme l’un des plus grands peintres de la Renaissance italienne à Florence. À travers une quarantaine d’oeuvres, le musée Jacquemart-André nous dévoile pourquoi.
Le parcours illustre le génie créatif de Botticelli et ses productions en série aidés de ses assistants, comme cela était de mise à l’époque. Les ateliers florentins étaient un lieu de travail collaboratif et d’échanges, les apprentis passant d’un atelier à l’autre.
Sandro Botticelli se forme auprès de Filippo Lippi (1406-1469), grand représentant de la peinture du Quattrocento (première Renaissance italienne au 15e siècle), auprès de qui il apprend la technique de la peinture sur tempera et celle des fresques. La première salle regroupe des oeuvres de jeunesse qui montrent l’influence du maître sur son élève tout en annonçant les libertés qu’il prend par rapport à Lippi et à Andrea del Verrochio, autre grand peintre de l’époque. Ses Vierge à l’Enfant dénotent déjà d’une grande tendresse dans leur visage – caractéristique des figures féminines de Botticelli -, de sa maîtrise progressive des bâtiments architecturaux placés en arrière-plan, et des jeux de lumière dans les riches drapés qui reflètent le goût du luxe des Florentins.
L’importance du travail collaboratif de l’époque est illustré par deux panneaux issus de cassoni (coffres de mariage, décorés de scènes à valeur morale) et dont l’iconographie est tirée de Plutarque : la victoire de Pydna remportée sur les Grecs par Æmilius Paullus en 168 av.J.-C. Passée à l’infrarouge, l’oeuvre dévoile le travail apporté par Verrochio, Pollaiuolo, Botticelli et peut-être même le jeune Léonard de Vinci (traits hachurés dans les rochers).
Botticelli ouvre son propre atelier vers 1465, alors que règne à Florence une grande effervescence artistique. Les commandes pour les demeures patriciennes sont nombreuses. Les oeuvres sont insérées dans les lambris qui recouvrent les murs ou sur le mobilier. Botticelli réalise plans et dessins pour des tapisseries à la broderie et des marqueteries comme l’illustre la reproduction de la porte marquetée du Palazzo Duccale d’Urbino.
Pour faire face aux multiples commandes, le peintre excelle dans l’art du réemploi de figures féminines, qu’il adapte en fonction du support. Le personnage de Minerve, déesse de la guerre, de la sagesse et des arts à laquelle aime s’associer les Médicis, apparaît ainsi de manière récurrente. On la retrouve en particulier dans le portrait de La Belle Simonetta (vers 1485) Vespucci, célébrée de son vivant pour sa beauté et à laquelle Julien de Médicis vouait un amour chaste (elle était déjà mariée). Son visage traduit l’idéalisation de la beauté féminine qui anime les oeuvres botticelliennes des années 1480. Comme le reflètent également deux portraits de Vénus pudica (vers 1485/90) que l’artiste a le génie d’extraire d’un tableau (perdu) d’Apelle (peintre de l’Antiquité) et qu’il place sur un fond noir, renouant avec sa source d’inspiration de la sculpture antique tout en créant un genre nouveau.
Les deux dernières salles sont consacrées aux tondi (oeuvres de forme circulaire) illustrant des Vierge à l’Enfant avec un arrière-plan architectural gothique et aux oeuvres ultimes où la figure féminine est de plus en plus imposante, perdant de sa grâce. Botticelli est alors affaibli physiquement et doit laisser la main à ses assistants.
Une exposition pour les admirateurs de l’art de la Renaissance italienne, la somptuosité de ses drapés et de ses ors dans les scènes religieuses et les portraits mondains.