Les Grands Monuments de Lutèce
Jusqu’au 31 janvier 2010
Crypte archéologique du Parvis Notre-Dame, Place Jean-Paul II, 75004, 4€
Qui ne connaît pas, au moins de nom, les « arènes de Lutèce » et les « thermes de Cluny », vestiges de constructions gallo-romaines à Paris? Ces édifices du Quartier Latin, faisaient partie d’un ensemble architectural, aujourd’hui restitué dans une exposition de la Crypte archéologique du Parvis Notre-Dame. Pour nous faire découvrir ce qu’a été le premier projet urbain de Paris.
De -58 à -50 avant Jésus-Christ, Jules César entreprend la « guerre des Gaules » ou conquête de la Gaule afin de placer les Gaulois sous la loi romaine. A l’appel de Vercingétorix, les celtes Parisii, implantés à Lutèce, tentent de résister à leur puissant ennemi méridional. En vain. Ils tombent devant l’armée du lieutenant de César, Labiénus, en -52 av.J.-C..
Le successeur de César, son petit neveu et fils adoptif, Auguste (-63 av.J.-C. – 14 ap.J.-C.), premier Empereur romain, réorganise les provinces gauloises pour mieux contrôler les Parisii. C’est à cet effet qu’un réseau de grands monuments est instauré à Lutèce pour accueillir les institutions municipales, gérées par des édiles assujettis à l’Empire Auguste.
La ville (civitas) s’épanouit grâce à la pratique de l’évergétisme, selon laquelle un puissant, dont l’Empereur lui-même, finance des constructions publiques pour faire profiter les habitants des richesses de leur cité.
La caractéristique principale du premier projet urbain de Paris réside dans son quadrillage: une grille orthogonale selon un axe sud-nord appelé cardo maximus (actuelles rue Saint-Jacques, rue de la Cité et rue Saint-Martin). Cet axe représente l’épine dorsale de la trame des rues et des égouts, construits perpendiculairement et parallèlement à la Seine.
Le coeur de Lutèce s’organise à partir de la Montagne Sainte-Geneviève avec, à son sommet le forum, à mi-pente le théâtre découvert (actuelle rue Racine), les thermes du Collège de France, l’amphithéâtre (dit aujourd’hui arènes de Lutèce), les thermes de la rue Gay-Lussac et ceux de Cluny. Ce carré monumental de 88,8 x 88,8 mètres fait de Lutèce une ville typiquement romaine.
L’exposition décrit tour à tour le rôle de chacun des monuments en restituant les décors d’époque.
Le forum – centre symbolique et réel de toute cité romaine – joue un rôle à la fois religieux, civil et commercial. Celui de Lutèce est construit sur l’actuelle place du Panthéon, tout proche du cardo maximus. L’aire ouest de la place, sacrée, est dédiée au culte de l’Empereur; l’aire est, publique, permet de traiter des affaires matérielles (boutiques) et spirituelles (basilique).
Les thermes ou établissements de bains publics constituent la deuxième caractéristique d’une cité romaine. Les Parisii viennent s’y laver, se faire soigner, faire du sport mais aussi rencontrer des amis et se divertir. Le bain romain consiste à alterner eau chaude et froide. Le protocole de soins est le suivant. Le baigneur s’échauffe dans la palestre (cour prévue à cet effet) ou dans le gymnase qui fait aussi office de vestiaire, où il se déshabille complètement. Puis, il passe succesivement: au tepidarium d’entrée, pièce tiède; au destricarium, où il se nettoie la peau; au laconicum, étuve sèche; au caldarium, où il prend un bain chaud pour se délasser. Enfin, il redescend progressivement de température en passant par un tepidarium de sortie avant de finir dans un frigidarium, où il se trempe dans l’eau froide.
Les arènes de Lutèce font office d’édifice de spectacle. On y regarde des luttes de gladiateurs (munera), des combats contre les bêtes (venationes), des exécutions de condamnés par des bêtes sauvages (damnatio ad bestias)… Elles sont construites à la fin du Ier siècle, en dehors de la ville car le sang y est versé. Elles peuvent accueillir jusqu’à 17.000 spectateurs. Les arènes de Lutèce présentent l’originalité de combiner la structure d’une arène à celle d’une scène de théâtre.
A la fin du Ve siècle, le déclin de la culture populaire romaine conduit l’amphithéâtre à être réduit d’un tiers pour être utilisé comme carrière. En 1870, un second tiers est transformé en parking pour omnibus. Le dernier tiers, très bien conservé, a bénéficié du soutien de la Société des Amis dont son membre le plus prestigieux s’appelait Victor Hugo.
Le théâtre de la rue Racine n’a, pour sa part, conservé que de rares vestiges souterrains (sous la rue Racine et le collège Saint Louis). De taille moyenne, il avait pour fonction de présenter des divertissement légers. Les acteurs jouent en mimant et dansant tandis qu’un choeur chante les textes, accompagné d’un orchestre.
En dehors de la cité, des sanctuaires sont construits pour les rites de sacrifices. A l’époque gallo-romaine, la butte Montmartre se situe à 4km de Lutèce. Il est possible qu’un temple sur la colline ait été dédié à Mars (dans le jardin du Calvaire, autour de l’église Saint-Pierre) et un autre à Mercure (rue Lepic). Si les structures archéologiques témoignent bien d’une architecture sacrée gallo-romaine, rien ne prouve, en revanche, que des cultes y étaient réellement célébrés.
En 1997, des recherches ont permis de découvrir un nouveau sanctuaire, sur le site antique de Vanves, lui aussi disant de 4km de Lutèce.
Au IIIe siècle, les invasions germaniques accélèrent le sentiment d’insécurité dans les villes. Les élites municipales quittent les cités qui diminuent de territoire. Les axes routiers ne sont plus entretenus, l’habitat régresse. Au-delà de Lutèce, ce siècle marque un recul urbain général en Gaule.
Au IXe siècle, le coeur de Lutèce se déplace vers l’île de la Cité, qui formera le deuxième projet urbain de Paris.
Une exposition qui intéressera les plus parisophiles d’entre vous. La Crypte archéologique du Parvis Notre-Dame, aménagée en 1980, permet en outre de visualiser l’évolution urbaine et architecturale de l’île de la Cité, coeur historique de Paris. Devenue capitale des Francs, sous Clovis, dès le VIe siècle!
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