Victor Brauner – « Je suis le rêve. Je suis l’inspiration »
Sarah Moon – PasséPrésent
Jusqu’au 10 janvier 2021
Musée d’Art Moderne de Paris, 11 avenue du Président Wilson, Paris 16e
Le Musée d’Art Moderne de Paris dévoile les oeuvres de la photographe française Sarah Moon et celles du peintre d’origine roumaine Victor Brauner. Deux artistes atypiques à découvrir.
PasséPrésent
Sarah Moon (née Marielle Sarah Warin, née en 1941, à Vernon) accroche le regard par ses photographies en noir et blanc qui défient les notions de temporalité.
L’accrochage des Polaroïds, dense, comme au XIXe siècle (à l’inverse de ce qui se fait en scénographie muséale contemporaine !), s’articule autour de cinq films réalisés par l’artiste.
D’abord mannequin, Sarah Moon se fait connaître par ses photographies de campagne de mode pour Cacharel, Yamamoto, Miyake. Sa marque de fabrique sont les accidents laissés sur ses tirages.
La pellicule du Polaroïds est une surface très fragile. « En italien, ‘pelicula’ veut dire ‘petite peau’. Cette surface sensible se détériore tout d’un coup. Elle reste aussi éphémère que l’instant du cliché. Que cet instant soit dénaturé au moment où je le saisis, qu’il porte en soi déjà la marque de sa fin, sont quelques-unes des raisons pour lesquelles j’ai toujours laissé les accidents sur le négatif du Polaroïd », explique-t-elle.
On admire des photographies de nature (fleurs, bambous, oiseaux, paysages), de corps de femmes drapées dans des robes virevoltantes. Son oeuvre semble composée de « bouts et morceaux », tel un bric à brac fragmentaire avec un jeu sur le flou grainé, le dédoublement. Une oeuvre non conventionnelle, expérimentale, artisanale, inédite.
« Je suis le rêve. Je suis l’inspiration. »
En sortant de la première galerie, on accède directement à celle où est présentée l’oeuvre de Victor Brauner (1903-1966), figure originale du surréalisme.
Le parcours, chronologique, débute à ses années roumaines, se poursuit avec son intégration au mouvement surréaliste à Paris de 1933 à 1948, puis les années de guerre, et celles de l’après surréalisme (1949-1966).
Influencé par l’ésotérisme de son père, Brauner se réfugie dans l’étude de doctrines secrètes (tarot, alchimie, spiritisme, kabbale) pour s’évader du climat délétère et meurtrier de la Seconde Guerre mondiale. Il est juif, en situation irrégulière et doit fuir dans le Sud de la France. En 1938, il perd son oeil gauche. En 1945, il retourne à Paris et s’installe dans l’ancien atelier du Douanier Rousseau. Il commence à exposer à l’étranger, de New York à Prague. Il représente la France à la Biennale de Venise l’année de sa mort.
Ses oeuvres se caractérisent par le monde mystérieux dans lequel l’artiste s’évade. Ses personnages sont hybrides (Femme chatte), ses compositions souvent symétriques (Congloméros, 1945). Son style m’évoque à la fois l’art aborigène (Jacqueline au grand voyage, 1946) et précolombien (Cérémonie), le tout dominé par une imagination surréaliste (Le Surréalisme, 1947). Une oeuvre fascinante de créativité.