Jusqu’au 03 novembre 2019
Mémorial de la Shoah, 17 rue Geoffroy-l’Asnier, Paris 4e, Entrée libre
Le Mémorial de la Shoah présente une exposition inédite sur le marché de l’art sous l’Occupation. Un marché florissant pour certains qui s’approvisionnent à Paris, où plus de deux millions d’objets transitent entre 1941 et 1942. Tandis que les familles juives subissent la spoliation de leurs oeuvres.
Le parcours débute par une promenade urbaine, reconstituant les vitrines des galeries parisiennes de renom comme Berthe Weill (au 25 rue Victor Massé, 9e) – une des premières femmes marchandes de tableaux qui met en avant Raoul Dufy – ; Pierre Loeb (au 13 rue Bonaparte puis au 2 rue des Beaux-Arts, 6e) qui fait découvrir Picasso ; Paul Rosenberg (au 21 rue de la Boétie, 8e) ou encore René Gimpel, marchand d’art de la place Vendôme. Tous sont Juifs et doivent faire face à l’aryanisation de leurs biens (galerie et oeuvres). Fermées et recouvertes du blanc de Meudon ou reprises par des administrateurs, les galeries ne retrouveront pas tous leurs propriétaires et les oeuvres qu’elles contenaient.
La seconde section reconstitue l’Hôtel des Ventes aux enchères publiques de la rue Drouot (9e). L’afflux de marchandises de l’époque correspond à la spoliation des oeuvres détenues par les familles juives, qui ont en outre l’interdiction d’entrer dans la salle. Une vidéo diffuse les biens vendus, dont quelques-uns sont exposés.
L’aryanisation des biens juifs décrétée à l’automne 1940 dans la zone occupée s’étend à la zone libre. La vente aux enchères du « Cabinet d’un amateur parisien », qui a lieu dans le hall du Savoy-Palace à Nice en juin 1942, correspond à la dispersion de la collection d’art d’Armand Isaac Dorville (1845-1941). Avocat au barreau de Paris et donateur du musée des Arts décoratifs, du musée Carnavalet et du musée du Louvre, Dorville, traqué, se réfugie dans sa propriété de Cubjac en Dordogne. Il y meurt sans descendance directe. Ses biens sont vendus et l’argent obtenu va directement dans les caisses de l’administration de Vichy.
Le parcours se termine sur la présentation de toiles de John Constable, Thomas Couture et George Romney, présentées par des chercheurs de provenance afin d’expliciter leurs méthodes et ceux qui voudraient obtenir des informations sur la disparition d’objets culturels pendant l’Occupation.
Une exposition très bien documentée grâce aux recherches d’Emmanuelle Polack, qui conclut que les protagonistes du marché de l’art français ont peu été inquiétés par les autorités pour leurs sombres pratiques. Cependant, l’été dernier, Edouard Philippe a annoncé un renforcement des services dédiés à la restitution des biens culturels spoliés pendant l’Occupation. Mieux vaut tard que jamais…