L’essor des boissons exotiques au XVIIIe siècle
Jusqu’au 27 septembre 2015
Catalogue de l’exposition :
Musée Cognac-Jay, 8 rue Elzévir, Paris III
Si le thé, café ou chocolat constitue un acte de consommation quotidienne pour bien d’entre-nous – parfois même, sans y pensé, par simple réflexe ! -, tel n’était pas le cas avant le XVIIIe siècle en Europe. Ces boissons importées, « exotiques », créent de nouveaux plaisirs et sociabilités sur lesquels revient le musée Cognac-Jay.
« Point de maison bourgeoise où, à dîner, l’on ne vous présente du café. Point de fille de boutique, de cuisinière, de femme de chambre, qui, le matin, ne déjeune avec du café au lait. Ce goût […] a passé même jusqu’aux dernières classes du peuple », constate Le Grand d’Aussy dans son Histoire de la vie privée des Français, depuis l’origine jusqu’à nos jours (1782).
Pourtant, la popularité de ces boissons ne s’est pas faite du jour au lendemain ! Si le thé est d’usage facile par sa simple infusion de feuilles, le café et le chocolat – servi alors épicé – ont requis un certain savoir-faire qui ont donné naissance aux cafés parisiens et à une vaisselle appropriée.
On date à 1298 la première description d’une boisson issue du thé dans Le Devisement du monde par Marco Polo, dont la première édition est imprimée en 1477. Ensuite, il faut attendre 1524 pour que Cortez rapporte à Charles Quint des fèves de cacao. En 1606, Amsterdam enregistre la première cargaison de thé noir issu de Java. Et, en 1644, Pierre de la Roque débarque d’Orient à Marseille avec des cerises de café et des ustensiles de préparation du café à la turque.
Le mariage de Louis XIV et de Marie-Thérèse d’Autriche en 1660 lance la mode du chocolat à la cour. Quant au café, son usage se diffuse dans l’élite aristocratique, suite au séjour parisien de Soliman Aga Mustapha Raca auprès de Louis XIV, en 1669.
Le Procope, premier café parisien, ouvre en 1674. Cinq ans plus tard, les premières fèves de cacao françaises, produites aux Antilles, sont livrées à Brest.
En 1687, Nicolas de Blégny publie la première synthèse médicale sur les vertus des trois boissons exotiques (Le Bon usage du thé, du café et du chocolate).
Le thé obtient moins de succès car son commerce est contrôlé par les Anglais ; il est lourdement taxé et les Français rechignent à verser tribut à leur ennemi de la route maritime des Indes ! Il faut attendre la seconde moitié du XVIIe siècle pour que les élites aristocratiques adoptent les codes vestimentaires, décoratifs et gustatifs d’outre-Manche et que la consommation de thé se répande.
L’exposition s’articule autour de trois axes : « vertus et dangers des boissons exotiques », « cercles de consommation », et « nouveaux services ». Elle offre un nouveau regard sur ces boissons appréciées autant que décriées comme l’écrivait la Marquise de Sévigné à sa fille (devenue Mme de Grignan) : « Je peux vous dire, ma chère enfant, que le chocolat n’est plus avec moi comme il l’était. La mode m’a entraînée comme elle le fait toujours. Tous ceux qui m’en disaient du bien m’en disent du mal. On le maudit, on l’accuse de tous les maux que l’on a. Il est la source des vapeurs et des palpitations, il vous flatte pour un temps puis il vous allume tout d’un coup d’une fièvre continue qui vous conduit à la mort » (Lettre du 15 avril 1671).
Une petite exposition familiale, qui s’accompagne d’un dispositif olfactif contemporain composé de trois colonnes à hauteur différente (pour que chacun, enfant et adulte, puisse y coller son nez !) recréant de manière naturelle à 70% les odeurs d’un chocolat épicé comme au XVIIIe siècle (cannelle, piment, clou de girofle, vanille), d’un cappuccino et d’un expresso. A noter aussi : l’application disponible gratuitement qui complète l’exposition et propose aux gourmets des recettes d’antan à reproduire chez soi !