Henri Cartier-Bresson / Walker Evans: Photographier l’Amérique (1929-1947)
Jusqu’au 21 décembre 2008
Fondation Henri Cartier-Bresson, 2, impasse Lebouis 75014, 6€
Pour célébrer le centenaire de la naissance d’Henri Cartier-Bresson (1908-2004), sa Fondation expose des clichés inédits aux côtés de ceux du photographe américain Walker Evans (1903-1975). Ces deux grands photographes se passionnent pour l’Amérique populaire. Scènes de rue, paysages ruraux, ghettos noirs, déchéance humaine captent le même intérêt des artistes, bien qu’ils l’expriment d’une manière différente.
« Sans le défi que représentait l’oeuvre de Walker Evans, je ne pense pas que je serai resté photographe », écrit en 2001 Henri Cartier-Bresson à Peter Galassi, commissaire de l’exposition Henri Cartier-Bresson, The Early Work au MoMA en 1975. De son côté, Evans écrit dans le New York Times (1952): « Cartier-Bresson est un véritable homme de l’oeil. Il fut en outre l’un des rares innovateurs en photographie ».
L’admiration mutuelle que se portent les deux hommes n’est pas la seule justification au parallèle dressé entre leur art dans cette exposition.
Après un détour par la peinture et le cinéma pour Henri Cartier-Bresson, par la littérature pour Walker Evans, les deux artistes jettent leur dévolue sur la photographie.
Le Français affirme: « C’est l’Amérique qui m’a fait ». Tandis que l’Américain se consacre au medium photographique après un séjour à Paris (1926/27), où il étudie la littérature à la Sorbonne. Le galeriste new-yorkais Julien Lévy consacre à Henri Cartier-Bresson sa première exposition en 1933. C’est là que Walker Evans découvre l’artiste français. Les deux hommes finissent par se rencontrer lors d’une exposition commune chez J. Lévy en 1935 (avec également le photographe mexicain Manuel Alvarez Bravo).
L’exposition expose ainsi quatre-vingt six tirages d’époque des deux artistes, offrant un panorama de l’Amérique des années 1930. New York, Chicago, Washington, Californie, Etats du Sud (Mississipi, Alabama, Louisiane) se révèlent dans leur déchéance. Des corps d’hommes souls allongés à même le sol, des intérieurs de maisons délabrés, des enfants jouant sous des ponts de chemins de fer.
Si Walker Evans s’intéresse, selon ses propres mots, à « ce dont le temps présent aura l’air au passé », Henri Cartier-Bresson privilégie l’instant décisif, « l’image à la sauvette ». Comme l’illustre cette photographie où le train arrière d’un chien est capturé en l’air. Où la scène, à Harlem, d’Afro-Américains fumant le cigare, une femme à la fenêtre parlant ou chantonnant, semble se dérouler en live.
Une exposition qui permet de redécouvrir l’oeuvre d’Henri Cartier-Bresson grâce à un jeu de miroir intelligent, à la fois réfléchissant, de part la thématique, et déformant du fait du regard d’altérité qu’apporte Walker Evans. Une confrontation entre deux regards du siècle.
NB: Deux visuels sont libres de droit par article d’où l’absence d’images supplémentaires.